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LE MONDE GRÉCO-SLAVE.

devaient refondre tout le code civil, rédigé par Davidovitj conformément à la procédure française, et qui avait été reconnu inapplicable à l’état social des Serbes. Miloch, qui, pour tranquilliser Nicolas, avait dû remettre à Dolgorouki un écrit signé où il s’engageait à donner à son pays une constitution avant trois mois, pensait qu’il trouverait dans les deux légistes des agens dociles, tout prêts à couvrir ses illégalités de leur nom. Il présenta donc à leur approbation un statut organique dressé par Jivanovitj. Après avoir lu cet oustav, qui faisait des sovietniks autant de valets du prince, Lazarevitj, absolutiste par principes, n’y trouva rien à changer ; mais son collègue Hadchitj refusa de le souscrire. La commission constituante, qui était formée de sept membres sous la présidence d’Ephrem, se scinda alors en deux partis, l’un qui voulait les amendemens proposés par Hadchitj, l’autre qui flétrissait ces amendemens comme démagogiques, et se contentait d’un semblant de constitution. Raditjevitj, citoyen estimé de tous, vint se jeter entre les deux partis, et proposa un oustav conciliateur, sur lequel la commission fut appelée à voter en février 1838. Tout à coup le consul Hodges, s’apercevant que les plans commerciaux de l’Angleterre allaient échouer, détermina Miloch, dont il était devenu le principal appui, à porter la question devant son suzerain Mahmoud. Ainsi la Russie fut jouée par l’Angleterre dans l’espérance qu’elle avait conçue de s’attribuer à elle seule la ratification du nouvel oustav serbe, sans l’intervention de la Porte. Miloch déclara la commission dissoute, et les différens projets de constitution furent tous envoyés à Stambol, du consentement même du consul russe Vachtchenko, qui s’était enfin installé le 10 février à Belgrad. En transportant le débat devant le cabinet de Stambol, sur lequel l’or a une action si sûre, Hodges et Miloch espéraient arriver plus aisément à leurs fins. Douze mille ducats furent, dit-on, offerts à Mahmoud pour qu’il voulût bien ratifier le choix des trois commissaires chargés d’exposer devant lui les désirs des Serbes ; mais le sultan, qui avait une confiance toute particulière dans Petronievitj, chef des réfugiés serbes, exigea qu’il fût du nombre des commissaires, et Miloch fut forcé de le nommer. Seulement, pour paralyser l’action du commissaire désigné par Mahmoud, il lui adjoignit Jivanovitj, homme de puissante intrigue et l’ame de son gouvernement. Le troisième député fut Spasitj, gouverneur de Smederevo, soldat grossier, qui, sentant sa nullité intellectuelle, riait lui-même fort librement avec Miloch de sa mission constituante.

Jivanovitj était parti en jurant à son cher maître et au consul