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DU MONOPOLE DE L’INDUSTRIE DES TABACS.

quantité de tabac dont elle a besoin pour son approvisionnement, et répartit cette quantité entre les divers départemens producteurs. Pour faire cette répartition on tient compte sans aucun doute des quantités que chacun d’eux est dans l’habitude de fournir ; mais, comme tout dans le monopole du tabac par l’état est subordonné à l’intérêt de l’impôt, auquel la culture serait facilement sacrifiée, on fait en sorte de demander l’approvisionnement aux cultures dont les produits conviennent le mieux aux besoins de la fabrication, et peuvent être obtenues aux prix relativement les plus modérés. Le but du monopole par l’état est uniquement de rapporter le plus gros revenu possible, en livrant à la consommation le meilleur produit pour contenter en même temps le goût du consommateur. C’est ce principe qui doit présider toutes les décisions prises sur la culture de chaque département par le préfet, en conseil de préfecture, après l’avis du directeur des contributions indirectes, et de deux des principaux planteurs appelés à faire valoir les droits de l’agriculture.

L’uniformité ne peut être établie entre les diverses contrées pour ce qui concerne les diverses méthodes de culture, car les différens sols ne sont pas partout également fertiles, les engrais ne sont pas partout également abondans et de même nature. L’espèce de tabac cultivé n’est pas non plus partout la même ; sur certains points, la graine qu’on emploie donne des plants d’une très grande dimension ; sur d’autres points, les plants prennent une croissance beaucoup moindre, et par conséquent ont besoin de moins de place. Enfin certains départemens produisent de bon tabac pour la poudre, et par conséquent doivent prendre une forte végétation ; ce sont le Lot, le Nord, le Lot-et-Garonne, l’Ille-et-Vilaine. D’autres départemens au contraire produisent des tabacs légers, propres surtout à la fabrication du tabac à fumer, et par conséquent on doit s’abstenir d’amender fortement les terres et d’espacer beaucoup les plants ; ce sont le Pas-de-Calais et le Bas-Rhin. Ce sont ces considérations qui ont déterminé la régie à permettre 40,000 pieds de tabac par hectare, et jusqu’à quinze feuilles par pied dans certains départemens, tandis que dans d’autres départemens on n’accorde que 10,000 pieds par hectare et huit feuilles par pied. Dans tous les cas, la loi et les dispositions réglementaires prises en conséquence laissent au planteur la latitude d’un cinquième tant au-dessus qu’au-dessous du nombre de pieds portés dans leurs permis.

Lorsque le planteur vient livrer ses tabacs aux magasins de l’état, il les présente à l’appréciation d’experts nommés par le préfet de chaque département. Ces experts doivent être connaisseurs, n’avoir aucun intérêt dans la culture du tabac, et parmi eux doivent se trouver nécessairement le garde et le contrôleur de chacun des magasins où les tabacs sont livrés. Ils sont payés au moyen d’une retenue d’un centime par kilogramme, faite sur les prix accordés aux planteurs. La commission d’expertise classe les tabacs en trois classes, fait de plus une classe de tabacs non marchands qui sont achetés à