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LES CHEMINS DE FER.

et de Londres à Birmingham, M. Robert Stephenson, est le document qui a le plus contribué à enflammer les imaginations. Il importe donc d’en contrôler les données en rapprochant les hypothèses des faits.

Pour évaluer le produit du transport des voyageurs sur les chemins du Nord, M. Stephenson à relevé le nombre des voitures de toute espèce qui parcourent aujourd’hui, soit des fractions quelconques de la ligne, soit la distance entière. Il a multiplié le nombre approximatif des voyageurs par le parcours que chacun d’eux accomplit, et il a trouvé un produit total de 112,247,985 kilomètres parcourus qui, à raison de 6 c. 1/2 en moyenne par voyageur et par kilomètre, donneraient 7,296,110 fr. par an ; en y joignant les voyageurs qui prennent la voie de la poste ou de la malle-poste, le résultat s’élèverait à 8,490,219 fr.

Pour évaluer le produit du transport des marchandises, M. Stephenson a suivi la même méthode. Il a multiplié le poids des marchandises qui circulent sur les voies d’eau, ou sur les routes de terre par le nombre des kilomètres parcourus, et il a trouvé, pour 550,000 tonneaux environ, un parcours de 84,524,347 kilomètres, qui produirait 12,636,740 fr. Total des recettes pour les voyageurs et pour les marchandises, 21,636,740 fr.

À la première inspection de ces chiffres, on découvre le vice des procédés d’évaluation auxquels M. Stephenson a eu recours. En effet, il a supposé, d’une part, que le nombre des voyageurs qui parcourent la ligne anglo-belge resterait stationnaire, ce qui est contredit par l’expérience de tous les chemins de fer, et, de l’autre, que le chemin de fer transporterait toutes les marchandises qui prennent aujourd’hui la voie de terre et le quart de celles qui prennent la voie d’eau, conclusion que les faits connus jusqu’à présent sont loin d’autoriser.

On peut admettre, même en tenant pour exagérée l’évaluation du nombre actuel des voyageurs telle que la donne le rapport de M. Stephenson, que ce nombre s’accroîtra en moyenne de moitié par l’effet d’une voie de communication plus rapide et d’un transport moins cher. Il est donc possible que le produit qui viendrait de cette source s’élève annuellement, pour la ligne anglo-belge, à 10 millions environ. Toutes les fractions des chemins du Nord ne seront pas également productives. Il y a telle distance, comme les dix-huit lieues de Creil à Amiens, dans laquelle on ne rencontre qu’un seul bourg de deux mille habitans. Entre Amiens et Arras, la route n’est jalonnée que par des villages. Il faudrait donc que la cir-