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le fruit non-seulement des efforts de M. Astor, mais encore des habitudes données aux Indiens par les Anglais ; et, si le gouvernement fédéral eût accepté les propositions de M. Astor en 1818, ils seraient aujourd’hui les seuls propriétaires en fait comme en droit de la côte occidentale de l’Amérique du Nord.

Non contens des avantages qu’ils avaient tirés de l’impéritie des États-Unis, les Anglais, s’apercevant de la faiblesse des titres qu’ils avaient invoqués, se tournèrent d’un autre côté. Comme la convention n’avait que la durée très limitée de dix années, les négociations pour un arrangement définitif étaient toujours pendantes. À deux reprises, en 1824 et en 1826, le gouvernement américain, mieux avisé, proposa de rétablir la ligne de démarcation fixée à la suite du traité d’Utrecht et si maladroitement abandonnée, c’est-à-dire de continuer au-delà des Montagnes Rocheuses la limite du 49e degré de latitude nord. Le cabinet britannique pouvait difficilement admettre cette proposition. Il offrit d’accepter pour limite une ligne tirée depuis les Montagnes Rocheuses, au point où s’arrêtait la démarcation reconnue, jusqu’à la source la plus proche de la Columbia, et de suivre le cours de cette rivière jusqu’à son embouchure. C’était précisément ce que les plénipotentiaires américains avaient refusé d’admettre en 1818. Cette fois le cabinet anglais n’invoquait plus seulement à l’appui de ses prétentions les achats de Drake et les découvertes de Cook, mais il affirmait que les premiers postes établis au-delà des Montagnes Rocheuses l’avaient été par la compagnie du nord-ouest, et cela lui suffisait pour que son titre valût celui des États-Unis, qu’il reconnaissait par là implicitement comme incontestable. Voici les termes de la note présentée par le gouvernement anglais à l’ambassadeur des États-Unis en 1826 : « En réponse aux allégations des États-Unis que leur droit sur le territoire de l’Oregon (comme héritiers du titre de l’Espagne et de celui de la France) est fortifié et confirmé par la découverte des sources de la Columbia, et par l’exploration de cette rivière jusqu’à son embouchure par Lewis et Clarke, la Grande-Bretagne affirme et peut nettement prouver que sinon avant, au moins dans les mêmes années et les années suivantes, la compagnie anglaise du nord-ouest avait fait établir par M. Tompson des postes au milieu des tribus indiennes auprès des sources ou sur la principale branche de la Columbia, qu’elle étendait graduellement sur tout le cours de cette rivière. De la sorte, la Grande-Bretagne a, pour la question de premier établissement aussi bien que pour celle de la découverte de l’embouchure de la Columbia, faite