Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 4.djvu/378

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
372
REVUE DES DEUX MONDES.

sûrement de l’emploi ; mais là aussi le même désappointement les attend : le marché du travail est surchargé.

« Ces deux grandes classes de travailleurs n’ont généralement que des motifs très avouables pour quitter leurs foyers ; mais lorsqu’une fois elles ont pris l’habitude d’une existence ambulante, elles ne peuvent plus se fixer. Un ouvrier qui a rôdé long-temps en quête de travail est perdu pour l’industrie.

« Un grand nombre de jeunes filles, qui viennent principalement des districts manufacturiers, quittent leurs familles par goût pour le changement, parce qu’elles manquent de travail, qu’elles sont maltraitées, ou qu’elles ont été attirées par les pourvoyeurs de la prostitution. L’avenir de ces malheureuses est à jamais ruiné, quand elles n’ont pas le bonheur d’être réclamées et renvoyées à leurs parens.

« Il est une quatrième classe, la plus nombreuse peut-être et qui s’accroît continuellement aux dépens des trois autres ; je veux parler du vagabond de profession (tramper), qui ne se livre pas un seul jour à un travail régulier, qui vit en trompant, en mendiant et en volant. Tous ces misérables, aussi long-temps que la maigreur de leur bourse le permet, passent la nuit dans ces garnis infimes que l’on trouve partout en Angleterre, et où l’encombrement est tel, la propreté tellement inconnue, que la vermine et les maladies cutanées finissent par les ronger. »

Voilà dans quel état tant de malheureux arrivent à Londres. On vient de voir qu’ils n’y trouvent ni emploi ni moyens de subsistance. Quel accueil cependant leur fait la charité publique, dans la personne de ses représentans officiels ? Écoutons encore M. Thwaites :

« Le système généralement adopté par les unions (paroisses unies) de la métropole consiste à donner, aux pauvres qui se présentent accidentellement, du pain, de l’eau et le logement pour une seule nuit ; ou bien l’on oblige les hommes à casser des pierres et les femmes à éplucher des étoupes (picking oakum) pour un salaire tellement minime, qu’une journée du travail le plus rude rapporte à peine à une famille entière la chétive pitance de quelques sous. Le nombre des unions qui rayonnent à une distance de dix milles de Saint-Paul n’est pas moindre de trente, qui sont tenues, selon l’interprétation donnée aujourd’hui à la loi des pauvres, d’assister toute personne qui demande des secours, et cela sans enquête préalable ; cette méthode aggrave le mal et encourage les vagabonds à aller d’une union à l’autre jusqu’à ce que, ayant complété le circuit de la métropole et des faubourgs, et étant tombés dans une misère égale