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LA SARDAIGNE.

port). Ses intentions furent si mal comprises ou si peu appréciées, que les volontaires placés sur le môle accueillirent cette embarcation par une décharge de mousqueterie qui tua plusieurs hommes. Après pareille réception, il fallait renoncer à l’espoir de convertir les Sardes : il ne restait plus qu’à les châtier. La flotte républicaine s’embossa devant Cagliari, et entama un bombardement qui dura vingt-quatre heures. Les batteries de la ville répondirent vigoureusement. L’amiral, voyant le peu de dommage causé par le feu mal dirigé de son artillerie, résolut d’attendre l’arrivée du convoi chargé de quatre mille cinq cents volontaires nationaux qui étaient partis de Ville-Franche au commencement de janvier. Un mois après, ce convoi rejoignit l’escadre. Un débarquement fut résolu. L’angle sud-est des fortifications, étant le côté faible de la place, indiquait naturellement le point d’attaque. De concert avec le commandant des troupes de terre, l’amiral Truguet pouvait disposer d’environ six mille hommes. Il jugea qu’il était facile de s’emparer, avec une pareille force, du mont Saint-Élie et des collines de Bonaria : des canons et des mortiers établis sur ces hauteurs auraient bientôt éteint le feu des bastions et celui des batteries de la marine. On aurait eu en outre l’avantage de commander de cette position les villages voisins, desquels on eût exigé toutes les provisions nécessaires à l’armée. C’était à peu près ainsi qu’avaient procédé les Espagnols en 1717, quand ils se logèrent près de l’église de San-Lucifero, assise au pied de la colline de Bonaria. Pour enlever le mont Saint-Élie, on devait débarquer sur la plage de la baie de Quartù quatre mille quatre cents hommes, tirés des régimens de ligne et des corps de volontaires, et, tandis que cette troupe aurait marché à l’est, un autre détachement devait faire une descente vers l’ouest, sous la protection d’un vaisseau chargé de détruire un petit fort incapable d’une longue résistance. Un autre vaisseau devait foudroyer une caserne établie au nord, et balayer le chemin de communication de la ville avec les hauteurs.

Le temps paraissant favorable, l’amiral prit position dans la baie de Quartù, à l’est du cap Saint-Élie. Trois frégates furent placées extrêmement près de la côte, pour la dégager et soutenir le débarquement En effet, la cavalerie sarde qui s’y rassembla fut aussitôt mise en déroute par l’artillerie républicaine. Le contre-amiral Latouche-Tréville venait de rallier l’amiral Truguet avec le vaisseau l’Entreprenant. Une circonstance heureuse réunissait ainsi, au moment d’agir, les deux officiers-généraux les plus distingués que pos-