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LE CARDINAL DE RICHELIEU.

et les puissances secondaires d’Italie[1] ; il faut donner aux alliés l’entière disposition de leurs forces : la paix entre la Suède et la Pologne est prorogée de vingt-six ans par la médiation de la France ; il faut rassurer sur leurs intérêts et leur avenir les bandes redoutables et les chefs ambitieux qui ont grandi dans la guerre : un traité de subsides est conclu avec le duc de Weimar[2], et ses plus hautes espérances sont tenues pour légitimes, s’il consent à n’en attendre la réalisation que du bon vouloir de la France.

Les négociations se suivent en Allemagne sur une triple base : empêcher les adhésions isolées des princes protestans à la convention de Prague passée entre l’empereur et la Saxe, obtenir des confédérés l’engagement de ne traiter qu’en commun, étendre et faire respecter la ligue de neutralité catholique placée sous la garantie spéciale de la France. Tous ces intérêts sont suivis en même temps, et la grande école diplomatique fondée par Richelieu, et que devait développer Mazarin, se montre déjà à la hauteur du rôle que les évènemens lui préparent.

La direction imprimée aux opérations militaires ne fait pas moins ressortir la sagacité du ministre ; Le cardinal de la Vallette, avec le jeune vicomte de Turenne, reçoit l’ordre d’entrer en Allemagne à la tête d’une puissante armée, pour seconder les Suédois. Mais c’est surtout en s’établissant d’une manière inexpugnable sur la rive gauche du Rhin que Richelieu entend opérer une diversion non moins utile à la cause particulière de la France qu’à la cause même des alliés ; c’est en occupant l’Alsace qu’il espère amener l’empereur à une paix dont il pourra dicter souverainement les conditions, lorsqu’il aura entre les mains toutes les positions auxquelles il aspire. Une grande partie d’entre elles était déjà au pouvoir de Louis XIII. Le duc de Lorraine n’avait pas imité la conduite habile du duc de Savoie. Pressé entre deux grandes puissances, il n’avait su ni ménager ses intérêts, ni pourvoir à sa sûreté. L’imprudence avec laquelle il s’était engagé dans le parti de Gaston avait déjà fourni l’occasion avidement recherchée de prendre contre lui des mesures militaires. En faisant, malgré l’opposition déclarée du roi, épouser la princesse sa sœur au duc d’Orléans retiré à sa cour, le duc de Lorraine avait provoqué une condamnation judiciaire pour rapt et séduction de per-

    des Pays-Bas espagnols était attribué à la Hollande. La paix ne devait être négociée que de concert.

  1. Juillet 1635.
  2. 26 octobre 1635.