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de la reine Pomaré à sa très chère sœur et amie aient été peu écoutées, que lord Lansdowne, comme lord Aberdeen, se soit hâté de déclarer « qu’il voyait sans aucune espèce d’inquiétude la domination française à Otaïti, » que l’affaire enfin ait obtenu dans le parlement tout juste le degré d’attention qu’elle méritait, cinq minutes de conversation.

À l’intérieur, le succès de sir Robert Peel pendant cette première partie de la session fut un peu plus contesté. Personne n’a oublié les mesures si hardies et si importantes par lesquelles il avait, en 1842, signalé son avénement et assuré son pouvoir. Mais ces mesures devaient, par leur nature même, froisser bien des intérêts, exciter bien des craintes, tromper bien des espérances. C’est ce qui arriva, et en passant de la théorie à la pratique, la taxe du revenu notamment parut plus dure et plus arbitraire qu’on ne l’avait supposé. Le commerce et l’industrie, d’ailleurs, continuaient à languir, la détresse du pays ne diminuait pas, et les tableaux trimestriels du revenu public jusqu’alors publiés indiquaient que les calculs de sir Robert Peel étaient loin de se réaliser, et qu’au lieu de l’excédant prévu il y aurait encore un déficit. La partie agricole du nouveau tarif surtout entretenait à un assez haut degré l’agitation des esprits. D’un côté, la ligue contre la loi des céréales, dirigée par l’habile et infatigable M. Cobden, s’étendait sur tout le pays, enrôlant partout des associés et levant des impôts sous forme de souscription ; de l’autre, des réunions agricoles avaient lieu où les hommes qui, aux dernières élections, avaient soutenu sir Robert Peel se plaignaient amèrement d’avoir été trompés par lui et par leurs représentans. « Mieux eût valu cent fois, disaient-ils, que nous restassions en minorité. Sir Robert Peel, aidé par la chambre des lords, eût alors empêché les whigs de faire ce qu’il a fait lui-même, grace à nos votes, grace au pouvoir dont nous l’avons investi. » À cela les amis des fermiers (farmers’ friends) répondaient en général d’un ton humble qu’ils regrettaient bien ce qui s’était passé, mais qu’ils n’avaient pu faire autrement. Il y en eut pourtant qui prirent leur parti, et qui bravement se déclarèrent convertis à la liberté du commerce en présence même du concurrent qu’ils avaient mis à la porte à ce titre. C’est ce qu’on vit notamment à un grand meeting du comté de Somerset, et cela valut aux membres actuels, MM. Acland et Dickinson, quelques complimens ironiques de l’ancien membre, M. Sanford, non réélu en 1842. « Je savais bien, dit celui-ci, que nos heureux concurrens en viendraient là ; mais je dois convenir qu’ils se sont exécutés plus