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DU MOUVEMENT CATHOLIQUE.

teurs que, s’il refusait à l’Université le droit de surveiller, il accordait du moins à l’état le droit de regarder, attendu que les catholiques enseigneront portes ouvertes. La logique de l’Univers est toujours de cette force.

Les ennemis prudens du monopole, tout en restant dans l’ombre, tiennent sous la main quelques condottieri qu’ils lancent en avant et qu’ils désavouent ensuite, ce qui leur assure tous les profits du scandale, sans qu’ils aient à redouter la responsabilité de l’attaque et les dangers du combat. M. Desgarets, le chanoine de Lyon, qui signe un ancien officier, devait nécessairement par souvenir de son premier état, marcher à l’avant-garde ; il s’est donc présenté sur le champ de bataille armé de ce Monopole universitaire, que la presse de toutes les opinions, que tous les hommes sages ont flétri d’un blâme sévère, et dont tout le monde a rougi, excepté l’auteur et l’Univers, qui débitait le pamphlet dans ses bureaux, et le défendait dans ses colonnes en même temps qu’il insérait l’apologie de M. Desgarets, écrite par M. Desgarets lui-même. On connaît la tactique du chanoine de Lyon et de ses acolytes : quand les faits précis manquent, on en invente ; on falsifie les citations, on reproche à l’Université de réhabiliter Marat et Robespierre, et l’on enferme les professeurs du corps enseignant dans un labyrinthe sans issue, en les déclarant impies, lorsqu’ils parlent au nom du libre examen, hypocrites, quand ils protestent de leur respect pour la religion.

En rapprochant le pamphlet de M. Desgarets des manifestations du même genre qui se sont produites sur différens points de la France, on pourrait croire à un mot d’ordre général. Déjà, en 1840, une Société d’ecclésiastiques s’organisait sous la présidence de M. Rohrbacher, pour dénoncer le monopole universitaire à la France libérale et à la France catholique. Plus tard, lorsqu’on affichait à Avignon, au coin des rues, l’annonce du livre de M. Desgarets, le révérend père Corail en donnait en chaire, dans la même ville, un commentaire intéressant. M. l’abbé Védrine, curé de Lupersac, a renchéri encore sur M. Desgarets ; le Simple coup d’œil, composé pendant une retraite diocésaine, en des instans qu’on croirait consacrés au recueillement et à la prière, n’a guère d’antécédens que dans les plus tristes diatribes de la ligue. L’Univers lui-même n’a pas osé avouer M. Védrine. Comment défendre en effet ces emportemens sans raison contre toutes les institutions et toutes les gloires, ces calomnies en style apocalyptique et en français facultatif contre un grand corps de l’état qu’on déclare couvert du sang de plusieurs générations ? Que répondre sérieusement à ces ultramontains échauffés qui réclament l’enseignement au nom du droit divin, en vertu de ces paroles du Christ : Ite et docete, comme si docete voulait dire : soyez professeurs ? En présence de ces réquisitoires, où la colère n’est souvent qu’une ruse de guerre, toute discussion est impossible ; on ne discute pas avec la mauvaise foi. Ce qu’on peut dire de plus sage à ces pamphlétaires en soutane, c’est de leur répéter ce conseil qu’on leur a déjà donné : avant de songer à ouvrir des écoles, ils feraient bien de fréquenter celles qui existent. Le Simple coup d’œil, comme le Monopole universitaire, a été fabriqué dans la grande offi-