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environ ; le Polochic, qu’il reçoit et qu’on dit praticable pour des bateaux à vapeur, pourrait servir à franchir une partie de ce dernier intervalle. Malheureusement, derrière le Polochic et les autres cours d’eau qui se déchargent dans le Golfo Dulce, les montagnes présentent une barrière insurmontable pour un canal. Un peu plus au sud-est une vallée transversale, celle de Comayagua, faisant brèche dans l’arête de partage, s’étend d’une mer à l’autre, et débouche dans le golfe de Conchagua (ou Fonseca) sur le Pacifique ; elle a été reconnue, il y a sept ou huit ans, par don Juan Galindo. Cette vallée est arrosée sur le versant de l’Atlantique par le Jagua, sur celui du Pacifique par le Sirano (ou San-Miguel), l’un et l’autre navigables. Mais jusqu’à quelle distance de leurs mers respectives le sont-ils ? combien de mois chaque année ? quel moyen aurait-on de les joindre l’un à l’autre par un canal à point de partage ? C’est ce que nous ne saurions dire. On peut cependant tenir pour certain, dès à présent, qu’il n’y a pas de canal maritime possible dans cette direction à moins de frais infinis. La distance est trop grande, et l’art aurait trop à faire pour suppléer à l’insuffisance des facilités naturelles.

Ces belles contrées sont encore très mal connues. On n’en trouve pas deux cartes qui se ressemblent. Tous les géographes s’accordent cependant à signaler quelques rivières qui prennent leurs sources près de l’un des océans pour aller de là se décharger dans l’autre. La plus remarquable est le Motagua qui, sortant d’un petit lac situé à quelques lieues du Pacifique, se jette dans l’Atlantique après avoir parcouru les cinq sixièmes au moins de l’espace qui sépare les deux mers. Les tributaires du Pacifique qui offrent le même caractère sont très peu nombreux. Même dans l’isthme, depuis Tehuantepec jusqu’au golfe de Darien, on voit persévérer la loi de la nature qui a accordé dans le nouveau continent un cours beaucoup plus long aux tributaires de l’Atlantique qu’à ceux de l’autre océan dont les sources s’entrelacent avec les leurs[1]. Le Camaluzon (ou Camaleçon), l’Ulua, paraissent aussi être navigables assez avant ; mais tous ces cours d’eau partent de points très élevés d’où il serait difficile ou impossible de conduire un canal dans l’océan opposé. Le Motagua, par exemple, naît sur un plateau d’une très grande hauteur. La province de Quesaltenango, qu’il traverse, donne toutes les productions des pays tempérés de l’Europe, ce qui, par 15 degrés de latitude, suppose une grande élévation. Les écrivains espagnols,

  1. Le Sirano, que nous citions tout à l’henre, y fait cependant exception.