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fabriques, mines ou usines, qu’après avoir atteint l’âge de neuf ans ; la durée du travail, pour les enfans de neuf à douze ans, est de dix heures, y compris deux heures pour l’enseignement.

Dans tous les règlemens promulgués en Allemagne, la protection de l’état ne s’étend pas aux jeunes gens comme en Angleterre, et paraît se borner aux enfans. Ces règlemens embrassent, avec les manufactures, les usines et les mines, que la loi anglaise avait négligées ; et comme l’apprentissage est déjà soumis dans les petits ateliers à des prescriptions légales, le travail des enfans se trouve ainsi plus universellement atteint. Il n’existe pas en Allemagne de surveillance spéciale, parce que les autorités locales exercent la tutelle que l’Angleterre a déférée à des inspecteurs ; et quant à l’instruction, les lois la rendant obligatoire à peu près dans tous les états germaniques, on n’a pas eu, comme en Angleterre, à établir des écoles ; il a suffi de veiller à ce que les fabriques ne fissent pas perdre aux enfans le bénéfice des moyens d’instruction qui existaient déjà. En somme, l’Allemagne était la contrée qui offrait les plus grandes facilités pour une législation sur le travail des enfans et des jeunes gens ; si les gouvernemens allemands n’ont pas établi des règles plus efficaces, c’est qu’ils ne l’ont pas voulu.

On peut en dire à peu près autant de la France, et cependant aucune loi n’a moins répondu à l’attente qu’elle avait excitée que celle du 22 mars 1841. Elle est plus générale dans ses dispositions que la loi anglaise, car elle embrasse « les manufactures, usines et ateliers à moteur mécanique ou à feu continu avec leurs dépendances, ainsi que toute fabrique occupant plus de vingt ouvriers réunis en atelier. » Cette disposition ne suffit pas, toute large qu’elle est, car on sait que les enfans ne sont nulle part plus excédés de travail ni plus maltraités que dans les petits ateliers, et la France n’a pas de loi qui règle les conditions de l’apprentissage de manière à mettre un frein aux abus.

La loi de 1841 se conforme peut-être trop servilement à l’usage, en décidant que les enfans pourront être admis dans les manufactures dès l’âge de huit ans. De huit à douze, le travail effectif ne peut pas excéder huit heures ; de douze à seize, il ne doit pas excéder douze heures par jour. Les travaux de nuit sont interdits pour les enfans au-dessous de treize ans. Quelle pénible complication, et qu’il est difficile de concilier ces règles avec la pratique de l’industrie ! On a imité l’Angleterre sans discernement ; on a fixé à huit heures la durée du travail pour les plus petits enfans, comme si la journée était de seize heures. On a limité à douze heures par jour le travail des adolescens, comme si les manufactures qui travaillent généralement treize à quatorze heures allaient s’arrêter au moment où les prescriptions légales en