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semblables désordres dans les provinces. Frappée de ces abus, la commission d’enquête demanda que le pouvoir du chambellan fût étendu et mieux défini, et que des mesures fussent adoptées pour qu’aucune entreprise ne pût s’établir sans autorisation ; toutefois, elle respecta le principe de la concurrence, et proposa, tout en maintenant les théâtres déjà autorisés, de déclarer que l’autorisation ne pourrait être refusée toutes les fois que, dans une grande paroisse ou un district populeux, l’ouverture d’un théâtre serait sollicitée par une pétition signée de la majorité des chefs de famille. Le chambellan devait être investi du droit de fermer tout théâtre non autorisé, et de se pourvoir auprès du ministre de l’intérieur pour faire prononcer sommairement la clôture de ceux qui auraient violé les conditions de leur privilège ou offensé la morale publique. Un bill qui reproduisait les conclusions de l’enquête passa presque sans opposition à la chambre des communes. Plus sévère, la chambre des lords le repoussa. Les raisons ne manquaient point pour justifier cette rigueur. On reprochait à ce bill de porter atteinte à la prérogative royale dans la disposition qui obligeait, en certains cas, le chambellan à accorder des privilèges ; on l’accusait de violer les droits de la propriété en créant une concurrence ruineuse pour les théâtres patentés. L’évêque de Londres s’éleva surtout avec force contre la proposition, se récria contre le préambule, qui considérait le théâtre comme un amusement moral et innocent, et se livra aux plus véhémentes attaques. Un projet qu’on accusait de blesser à la fois les privilèges de la couronne, les intérêts de la religion et le droit de propriété, ne pouvait trouver grâce devant les tories. Le bill fut donc rejeté ; représenté l’année suivante, il éprouva le même sort. Ce n’est que sous le ministère actuel que la question put être engagée de nouveau : un bill du 22 août 1843 adopte le travail de 1832 dans quelques-unes de ses dispositions, mais lui substitue un système plus simple et plus absolu. Aucun théâtre ne peut s’ouvrir, dans toute l’étendue de la Grande-Bretagne, sans lettres patentes de la reine ou sans une licence délivrée, selon les lieux, par le lord-chambellan ou par les juges de paix réunis en session spéciale, au nombre de quatre au moins ; en cas de contravention, l’amende encourue peut s’élever jusqu’à 20 livres sterl. pour chaque représentation non autorisée. Les pouvoirs du chambellan sont circonscrits dans l’enceinte de Londres et Westminster, de la banlieue et des résidences royales. L’autorisation se paie comme toute chose en Angleterre, où en général le public qui s’adresse à un employé de l’état est tenu de lui donner un salaire. Un tarif est établi à cet effet : le maximum de la rétribution s’élève, pour le chambellan, à 10 shellings