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de Machiavel. De perpétuelles négociations pour des traités qui ne devaient jamais être exécutés ont été combinées avec des instances continuelles pour obtenir la cession du Texas. En même temps, le Texas lui-même était poussé à la révolte contre le Mexique, et il a fini par lever la bannière de l’indépendance sous les auspices d’un officier tennessien, d’un commandant militaire qui avait Jackson pour ami et pour patron, qui s’était expatrié dans le but d’accomplir cette révolution et l’a accomplie en effet. Les États-Unis ont reconnu l’indépendance du Texas, mais la manière dont on a obtenu cette reconnaissance est un commentaire lumineux de l’amitié et de la bienveillance dont nous avons si orgueilleusement fait parade envers le Mexique. »

C’était à M. Van Buren de terminer l’œuvre menée si loin par le général Jackson. Dès l’année suivante, le Texas demanda à être incorporé aux États-Unis, et envoya à Washington M. Memucan Hunt pour ouvrir des négociations à ce sujet avec M. Forsyth, secrétaire d’état. M. Hunt proposait l’union pure et simple des deux peuples, mais à une seule condition qu’il faut remarquer, c’est que les Texiens conserveraient leur autorité pleine et incontestée sur leur population esclave. Les états du nord, qui avaient été fort irrités de la conduite du général Jackson dans toute cette affaire du Texas et avaient souvent protesté, élevèrent aussitôt la voix. Ce fut une réclamation universelle ; les législatures des états d’Ohio, de Rhode-Island et de Massachusetts, par des votes solennels, se déclarèrent ouvertement opposées à l’annexation, et le parti whig tout entier se prononça nettement contre la mesure. M. Webster prononça à New-York, dans une réunion de citoyens, un discours contre l’annexation qui fut fort applaudi. Quand la question fut portée incidemment devant le sénat, M. J. Quincy Adams se signala par l’énergie avec laquelle il combattit d’avance tout projet d’annexation. Son discours, qui remplit plusieurs séances et devint le programme du parti whig, fut, selon l’expression des journalistes américains, un coup de massue pour l’hydre de l’annexation. Enfin, le meilleur écrivain de l’Amérique après Washington Irving, le docteur Channing, publia, sous la forme d’une lettre adressée à M. Clay, une brochure qui eut le plus grand retentissement. M. Van Buren était loin d’avoir l’opiniâtreté de son prédécesseur ; c’est un esprit souple et adroit qui aimait mieux tourner les obstacles que les surmonter. A peine au pouvoir, il se sentait déjà ébranlé, sa majorité dans les chambres diminuait chaque jour ; il fut effrayé de ce concert de protestations, et n’osa affronter l’opposition des états du nord. D’ailleurs le Mexique avait protesté contre la reconnaissance de