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affaires. M. Calhoun éprouva un nouveau mécompte. Le parti jacksoniste l’emporta, il est vrai ; mais le caractère dominateur et arbitraire du nouveau président s’accommoda bien mieux de la souplesse un peu servile de son premier ministre, M. Van Buren, que des principes arrêtés et de la fermeté de son vice-président, M. Calhoun. Celui-ci d’ailleurs, avec un vif sentiment de sa dignité personnelle, était d’un caractère aussi impérieux et dominateur que le général Jackson, et, avec la conscience de son immense supériorité intellectuelle, il prétendait assez ouvertement à la suprême direction des affaires. Jackson inclina donc de plus en plus vers M. Van Buren, et finit par s’abandonner tout entier à lui : la succession sur laquelle M. Calhoun avait compté lui échappait encore une fois. Il rompit d’une manière éclatante avec le général Jackson et se jeta dans l’opposition, où, tout en combattant pour son propre compte, il se trouva, côte à côte avec M. Clay et M. Webster. Cette coalition des plus grands talens du congrès fut fatale à M. Van Buren, et le fit tomber de la présidence. y avait eu trêve de rivalités personnelles pour opposer à M. Van Buren, dans la personne du général Harrison, une popularité acquise sur les champs de bataille ; mais ce qui avait été élevé par l’épée tomba par l’épée à peine en possession du pouvoir, le général Harrison mourut, et un homme assez insignifiant, et qui pour cela même avait été porté à la vice-présidence, M. Tyler, se trouva tout à coup à la tête des affaires.

Le principal souci de tout président, c’est d’assurer sa réélection. M. Tyler, arrivé à la vice-présidence surtout avec l’appui et par la permission des whigs, et sans influence personnelle dans aucun parti, ne pouvait espérer sa réélection qu’autant qu’il serait adopté comme candidat par un des deux grands partis de l’Union. Il lui fallait donc se laisser diriger entièrement par M. Clay, afin de conserver l’appui des whigs ; mais M. Clay, chef de ce parti depuis longues années, et tenant entre ses mains le sort de M. Tyler, se résignerait-il à attendre quatre années encore, ou n’aimerait-il pas mieux, à difficulté égale, prendre le pouvoir pour lui-même que le donner à un autre ? M. Tyler le craignit : il chercha à séparer M. Clay de ses amis et à se substituer à lui dans la direction du parti whig. Malgré l’influence que lui donnait sa position, M. Tyler échoua dans sa tentative : il ne put réussir à conserver dans le cabinet qu’un seul ministre whig, M. Webster ; mais ni le concours de M. Webster, ni le traité Ashburton, ne gagnèrent à M. Tyler le parti whig, qui resta fidèle à M. Clay. M. Tyler d’ailleurs, homme du sud de naissance et d’éducation, ne pouvait se