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l’Acarnanie et de la Grèce occidentale, n’a pas calmé l’irritation excitée contre lui. On lui reproche surtout sa conduite dans les dernières élections ; on l’accuse d’avoir employé l’intrigue, la corruption, les menaces, et jusqu’à des arrestations arbitraires, pour faire triompher ses candidats. D’indignes manœuvres paraissent avoir été commises. Voilà le fruit des conseils de M. Lyons.

Les évènemens de la Grèce ont bien mal justifié les prévisions encore récentes de M. Guizot. Répondant à M. Billault, qui signalait l’opposition permanente de l’Angleterre et de la France en Grèce, opposition fondée sur ce que l’Angleterre doit désirer l’affaiblissement de la marine grecque, et la France son accroissement, M. le ministre des affaires étrangères, dans la séance du 20 janvier, se félicitait hautement des résultats obtenus à Athènes sous la tutelle de l’entente cordiale. A l’entendre, l’union des deux peuples représentée par celle de leurs agens avait déjà fondu ensemble les deux partis anglais et français. Ces dénominations s’effaçaient ; les chefs des deux partis, MM. Coletti et Mavrocordato, animés d’un même esprit, imitant par leur bon accord le généreux exemple qui leur était donné, travaillaient de concert, et dans des vues communes, à asseoir solidement la nouvelle constitution de leur pays. Obéissant à l’impulsion de leurs chefs, les hommes des deux partis se réunissaient pour marcher au même but ; la nation entière les suivait. L’entente cordiale, passant de l’Occident à l’Orient, était venue produire en Grèce tous ces miracles. On voit aujourd’hui comment ces prédictions sublimes se sont réalisées. M. Piscatory et M. Lyons n’ont pas marché deux mois ensemble. Sous l’influence de M. Lyons, le ministère Mavrocordato a précipité la Grèce dans les embarras et les discordes qui ont suspendu chez elle tout progrès, tout mouvement régulier de réforme, tout essai de régénération morale ou matérielle. Au lieu d’affermir la constitution, il l’a ébranlée ; au lieu d’être modéré et conciliant, il a été violent et arbitraire. Pendant ce temps, M. Coletti, blâmant des excès funestes à son pays, s’est isolé ; M. Piscatory, dans l’intérêt de la France, a fait de même, et les voilà rapprochés aujourd’hui par la chute de M. Mavrocordato, qui reçoit les consolations de M. Lyons. Qu’on nous parle maintenant des prévisions de M. Guizot et des heureux fruits de l’entente cordiale en Grèce !

Quoi qu’il en soit, l’influence française est au moment de se rétablir à la faveur des circonstances nouvelles. Avec le parti modéré, national, qui paraît sur le point de triompher dans la personne de M. Coletti, la France peut s’entendre intimement. Tous ses intérêts sont de ce côté, et c’est là aussi que l’on comprend le mieux la valeur et la loyauté de ses conseils. Chose digne de remarque : les partis que la France affectionne en Grèce comme en Espagne sont des partis modérés, constitutionnels, sincèrement dévoués à leur patrie, aussi généreux que sages. Tel est en Espagne le parti qui compte parmi ses chefs les plus honorables M. Martinez de la Rosa ; tel est celui que représente en Grèce M. Coletti, Au contraire, la diplomatie britannique