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pour en tirer des jugemens et des déterminations, sur les autres parties de l’organisme pour produire le mouvement. C’est dans le cerveau que ce pouvoir de réaction prend le caractère de la volonté. Son action sur les impressions, sa fonction caractéristique, c’est la pensée. Le cerveau est un viscère destiné à la produire, comme l’estomac à opérer la digestion et le foie à filtrer la bile. Les impressions, en arrivant au cerveau, le font entrer en activité, comme les alimens, en tombant dans l’estomac, l’excitent au mouvement, propre de ses fonctions. Les impressions parviennent au cerveau par l’entremise des nerfs ; le viscère entre en action, et bientôt il les renvoie métamorphosées en idées. Le cerveau digère en quelque sorte les impressions, et fait organiquement la sécrétion de la pensée.

La sensibilité est inexplicable dans la physique animale et dans la philosophie rationnelle, comme l’attraction dans la physique des masses. Le mode de communication des diverses parties du système nerveux entre elles, leur mode d’action sur les organes, sont couverts d’un voile épais ; mais, sans remonter à la cause de la sensibilité, laquelle se confond avec les causes premières, on peut conjecturer que l’agent invisible qui porte les impressions des extrémités sensibles aux divers centres, et de là rapporte vers les parties motrices l’impulsion qui doit y déterminer les mouvemens, est l’électricité modifiée par l’action vitale. Et quant à l’action vitale elle-même, impénétrable dans sa cause, il semble qu’elle puisse être rattachée aux lois générales du monde. Il est possible d’entrevoir dans la matière organisée une tendance à des mouvemens de dilatation et de contraction, et dans sa formation une certaine attraction, une certaine affinité, en un mot, des phénomènes qui paraissent susceptibles d’être ramenés aux conditions primitives du mouvement et de la matière en général.

C’est de cette philosophie, appuyée sur cette physiologie, que l’auteur se croit en droit de conclure que, puisque le mot facultés de l’homme n’est que l’énoncé général des opérations produites par le jeu des organes, et que ses facultés physiques, d’où naissent ses facultés morales, constituent l’ensemble de ces opérations, le physique et le moral se confondent à leur source, ou, pour mieux dire, le moral n’est que le physique considéré sous certains points de vue plus particuliers, l’unité du principe physique correspond à celle du principe moral qui n’en est pas distinct. Et par conséquent les sciences morales rentrent dans le domaine de la physique ; elles ne sont plus qu’une branche, une partie essentielle de l’histoire naturelle de l’homme. Et c’est peu que la physique de l’homme fournisse les bases de la philosophie rationnelle,