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ordre, d’après les facultés gracieusement accordées par sa sainteté, le cardinal ordonne dans le même édit d’amnistie la mort de tous les libéraux convaincus du crime de non-révélation, etc. Enfin il recommande aux autorités d’être inexorables, leur donnant le pouvoir de condamner d’après la simple vérification du fait, per inquisitonem. Ainsi, pour le bon ordre et par un trait lumineux de clémence, la police pouvait signer des arrêts de mort sans aucune forme de procès, et les quatre Légations étaient soumises au régime de la terreur.

On conçoit qu’au milieu d’un pays si cruellement persécuté, la vie de Rivarola fût en danger En 1828, un coup de pistolet tiré contre lui blesse à ses côtés un prêtre qui se trouvait dans sa voiture. La fureur du cardinal ne connut dès-lors plus de bornes : les arrestations furent multipliées à tel point qu’il fallut transformer en prisons de vieux couvens et de vastes palais. Tous les carbonari suspects furent saisis, chargés de chaînes, privés de tout secours ; les juges faisaient pendre cinq personnes en une fois. L’alarme fut jetée au sein même de la population innocente, et on émigrait pour fuir le gouvernement de Rivarola. Léon XII avait été chasseur dans sa jeunesse : les Romains disaient qu’après avoir chassé les animaux, il chassait les hommes.

Pie VIII montra moins d’intelligence politique encore que Léon XII. Comme ses prédécesseurs, il tenta la réforme du gouvernement, et il publia un tarif de douane si ruineux, que des cardinaux et des évêques refusèrent de le faire exécuter. Le saint-père dépouilla le port d’Ancône de ses franchises, et cet édit souleva un mécontentement si profond, qu’il fallut le révoquer au bout de trois jours. On touchait à 1830, et le gouvernement pontifical n’avait rien fait ni pour prévenir un soulèvement, ni pour fortifier le pouvoir ; le sanfédisme, institué pour étouffer les libéraux, ne faisait que les provoquer par ses violences contre-révolutionnaires.

La révolution de juillet releva les espérances des patriotes ; le principe de la non-intervention dissolvait la sainte-alliance, séparait l’Italie de l’Autriche, réduisait au néant le patronage de la cour de Vienne et laissait les princes à leurs propres forces. Que pouvait devenir le gouvernement pontifical ? Cette fois, la tentative de 1821 devait se renouveler dans l’Italie centrale, et l’interrègne du concave la favorisa dans les derniers jours de 1830. Le duc de Modène, effrayé de son isolement, tendait la main aux carbonari, conspirait avec Ciro Menotti ; on l’annonçait comme un libérateur, et sans doute il aurait