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et qui ne saurait être atteint à Douvres qu’au prix de sacrifices exorbitans. Sur la proposition et les calculs de son président, la compagnie du chemin de fer est devenue propriétaire du port de Folkstone pour une somme de 450,000 fr., et immédiatement elle en a employé 150,000 en travaux de curage. Il y avait dans le voisinage que des tavernes à matelots ; la compagnie a consacré 500,000 fr. à la construction d’un hôtel admirablement tenu, et où chaque classe de la société peut se procurer, à des prix gradués, les commodités de la vie qui sont à sa portée. Une route magnifique a été ouverte de la station à l’hôtel ; elle est desservie par des omnibus établis par la compagnie. Une double branche de chemin de fer de 1,200 mètres de longueur descend hardiment par une pente de 0. 032 vers le port ; elle aboutit à un vaste embarcadère en charpente garni de rails, de plaques tournantes, de grues, et s’avançant au milieu même du port ; les flancs des navires s’appliquent aux siens, et les wagons en reçoivent ou y versent directement les chargemens, sans retards et sans intermédiaires dispendieux. La compagnie achetait le port, non-seulement pour l’améliorer, mais aussi pour l’affranchir des droits de navigation et lui donner ainsi un nouveau degré de supériorité sur les bassins en concurrence. Ce calcul intelligent et généreux a porté ses fruits ; Folkstone reçoit aujourd’hui toutes les houilles nécessaires à l’approvisionnement de la partie du comté de Kent que traverse le chemin de fer, et la compagnie gagne sur ces transports beaucoup au-delà de ce que lui rendraient les droits de navigation auxquels elle a renoncé. Ce n’était pas assez d’avoir appelé sur cette voie une active circulation de marchandises ; il fallait la doter de tous les accessoires qui pouvaient y attirer les voyageurs ; un service de paquebots sur Boulogne a été organisé ; deux départs et deux arrivées ont lieu chaque jour, et ces bâtimens vont et viennent habituellement dans la même marée. Voilà pour le présent ; voilà l’état de choses à la création duquel ont suffi quelques mois : il sera complété par l’établissement d’une jetée circonflexe de 400 mètres de longueur, s’embranchant parallèlement au rivage sur la digue extérieure actuelle, et d’un brise-lame isolé, perpendiculaire, de 90 mètres, laissant deux passes, l’une du côté de la jetée, l’autre du côté de la terre. L’avant-port compris entre ces digues aura 10 hectares, et sur la moitié de son étendue il restera à basse mer au-delà de 4 mètres d’eau. La création de cet établissement permettrait peut-être d’ajourner les grands travaux projetés pour Douvres. Ceux de Folkstone coûteraient vingt fois moins, c’est-à-dire 2,500,000 fr.