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qui la mette au niveau de sa tâche. Les deux principaux établissemens de Boulogne sont un collège communal et un pensionnat de plein exercice fort nombreux, dirigé par un ecclésiastique qui, au lieu de chercher de mauvaises querelles à l’Université, lui fait une concurrence active et intelligente. Il n’est pas de ville où un nouveau collége royal reçût de plus nombreux élèves, fût mieux placé pour se perfectionner et exerçât une plus heureuse influence. La multiplicité des relations établies entre Boulogne et l’Angleterre initierait les professeurs de l’établissement aux méthodes employées chez nos voisins, à la direction donnée aux études dans leurs meilleurs collèges, aux réformes qu’ils introduisent dans les systèmes d’éducation. Si, dans ces rapprochemens, l’Université apprenait à mieux approprier l’instruction qu’elle donne à la destination des jeunes gens, qui lui sont confiés, le collége de Boulogne lui rendrait de très grands services. Le personnel devrait en être choisi avec un soin particulier, et pour soutenir la comparaison avec celui des établissemens anglais, et surtout en raison de la tâche qu’il aurait à remplir. L’infériorité où nous sommes à beaucoup d’égards dans le Pas-de-Calais, vis-à-vis de nos voisins, tient surtout à ce que, des grands foyers de lumière qui éclairent les deux pays, l’un est rapproché de la côte et est la première ville maritime du monde, tandis que l’autre en est éloigné et ne porte sur les affaires de la mer qu’une attention secondaire. Nous n’avons qu’un moyen d’atténuer ce désavantage : c’est de grouper en faisceau sur le littoral des intérêts assez puissans, des ressources assez nombreuses et assez fécondes pour constituer une sorte de métropole locale pourvue d’une force et exerçant une influence qui lui soient propres. Boulogne réunit déjà une grande partie des conditions à rechercher pour un pareil objet, et un grand établissement d’instruction publique en est le complément le plus indispensable : il faut s’occuper beaucoup de la jeunesse dans un pays auquel on veut assurer un grand avenir. Si d’ailleurs nous voulons fortifier la puissance navale de notre pays, qu’avons-nous de mieux à faire que de familiariser l’enfance avec le spectacle de la mer et d’éveiller ses goûts par la perspective des jouissances et des dangers de la navigation ? Cette considération devrait suffire à elle seule pour faire placer sur la côte plutôt que dans l’intérieur des terres le collége royal que le département, malgré ses 685,000 ames de population, ne possède pas encore : à une époque où tout ne fut pas mal fait, l’école centrale du Pas-de-Calais avait été établie à Boulogne[1], et la ville, au lieu d’être, comme aujourd’hui, la première du

  1. Décret du 3 brumaire an IV.