Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 8.djvu/991

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au lever du jour, la flamme se fût emparée de tout l’intérieur d’une église.

Ces accidens étaient si fréquens, que, dans cette seule année 1131 ; où la cathédrale de Noyon fut incendiée, le feu détruisit l’église Saint-Riquier et le bourg qui en dépendait, ainsi que plusieurs autres paroisses moins importantes des diocèses d’Amiens et de Beauvais. L’année précédente, en 1130, l’église Saint-Furcy de Péronne avait été la proie des flammes, et enfin, en 1136, nous voyons l’église Saint-Yaast d’Arras, avec son cloître, ses dépendances et une grande partie de la ville, presque entièrement détruite par le feu.

Mais aucun de ces incendies ne causa autant d’émotion et ne fit autant de bruit que celui de Noyon. Il est donc à présumer que ce désastre avait eu des conséquences encore plus terribles que de coutume, et il est impossible, par exemple, de ne pas supposer que la cathédrale avait dû être complètement ruinée, ou du moins qu’elle s’était trouvée, après l’incendie, dans un tel état, que de simples réparations eussent été insuffisantes. L’intervention du pape Innocent II, son appel aux archevêques de Rouen et de Sens, suffiraient, à défaut d’autres indices, pour attester qu’il ne s’agissait pas d’une simple restauration, et que l’édifice était à reconstruire de fond en comble.

Nous nous croyons donc autorisés à affirmer, sauf à en donner encore d’autres preuves, que l’église actuelle ne peut, dans aucun cas, être antérieure à l’année 1131. Nous verrons plus tard si la reconstruction fut immédiate, ou si elle ne dut pas traîner en longueur ; mais une chose est certaine, c’est que cette reconstruction dut être complète ; car l’édifice est bâti évidemment d’un jet, et c’est à peine, comme on l’a déjà vu, s’il s’y trouve un seul pan de muraille qui puisse être attribué à une époque plus ancienne.

Ainsi, ni le chœur de saint Médard, ni la nef de Charlemagne, ni les clochers de 1003 ne doivent avoir la prétention d’être parvenus jusqu’à nous, et cette date de 1131 est la plus ancienne à laquelle il soit permis de faire remonter le monument qui est devant nos yeux.

Mais une autre question se présente. L’incendie de 1293 ne paraît avoir été ni moins violent ni moins destructeur que celui de 1131. Ses ravages sont même attestés avec plus de précision, nous en connaissons mieux toutes les circonstances : nous savons qu’à l’exception des maisons des templiers et de la petite église Saint-Pierre, tous les monumens religieux de la ville furent réduits en cendres. Comment donc supposer que l’église du XIIe siècle ait survécu à cette catastrophe ? La même raison qui nous fait affirmer que l’ancien édifice a été détruit