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si grande influence sur la destinée des hommes éminens qui s’y étaient engagés. Fox, déchu de la haute position où il s’était élevé en combattant le ministère de lord North, se vit condamné à passer presque toute sa vie dans une opposition qu’il devait rendre, il est vrai, bien glorieuse, et qui peut-être convenait mieux que le pouvoir à la nature de ses facultés. Pitt, avant d’avoir terminé sa vingt-cinquième année, devint le premier homme politique de la Grande-Bretagne, et s’établit si fortement dans le gouvernement de son pays, qu’il sembla dès-lors en avoir fait sa propriété. Le courage, le sang-froid, l’incomparable sagacité, les talens si brillans et si variés dont il avait fait preuve dans cette terrible crise, l’avaient rendu l’idole du roi et de la nation, qui s’accordaient à voir en lui le sauveur de la prérogative royale, de l’ordre constitutionnel, et des droits même de la propriété menacée par une faction téméraire.

Un autre résultat plus important encore de la grande lutte de la coalition, ce fut la constitution définitive d’un nouveau parti tory complètement dégagé, cette fois, non-seulement des derniers restes du jacobitisme, mais même de l’esprit de cour et de servilité politique qu’il avait eu plus ou moins du temps de lord Bute et de lord North. Sous la direction de Pitt, éclairé, élevé par ses inspirations, le parti tory devint un véritable parti de gouvernement, aussi attaché, plus attaché même à la dynastie de Hanovre que celui des whigs, non moins constitutionnel et s’en distinguant seulement par sa tendance à appliquer les institutions dans un sens plus monarchique.


LOUIS DE VIEL-CASTEL.