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POÉSIES DE VOYAGE.


I.

la taverne


À la mémoire d’Ives Gestin.[1]


Tels sont les cœurs : parfois, sous les genêts fleuris,
En Bretagne il est doux de songer à Paris ;
Mais qu’aux bords de la Seine un autre ennui nous gagne,
Nous aimons dans Paris à causer de Bretagne.

— « Silence ! nous disait un soir ce bon Gestin,
« C’est la vie en breton du grand saint Corentin.
« Barde, écoutez ; pour vous, soldats, laissez vos verres ;
« Et, tous les trois, ouvrez des oreilles sévères.
« Sais-je comme aujourd’hui le langage a tourné,
« Et s’ils me comprendraient aux lieux où je suis né ?
« Ainsi, mes chers amis, faites un long silence
« Et pesez avec soin les mots dans la balance.
« J’ai cru, dans ce travail, tomber à chaque pas
« Car le cœur est fidèle et l’esprit ne l’est pas. » —

Le modeste écrivain ! comme de sa légende
S’exhalait cependant un doux parfum de lande !

  1. Mort récemment. On lui doit la Vie de saint Corentin, petit chef-d'oeuvre de langue celtique.