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Celui-ci s’employa si bien et avec tant de zèle dans cette affaire, que l’empereur de Bisnagar escrivit bientôt une lettre au père recteur du collége de Saint-Thomas, par laquelle il le priait de lui faire tant d’honneur que de le venir trouver en sa capitale. Le père recteur avant reçu cette lettre partit de la ville de Saint-Thomas le 10 octobre de l’an 1598, emmenant avec lui le père François Ricci, qui entendait passablement le tamoul, et le marchand chrétien qui devait leur servir de trucheman. Ce marchand leur rendit encore de bons services, tant en chemin que lorsqu’ils furent arrivés à Chandeghery ; car il les mit aussitôt en rapport avec le raja Obo, beau-père de l’empereur de Vijayanagar, qui leur obtint une audience de sa majesté. Le roi de Vijayanagar fit un excellent accueil aux deux pères de la compagnie de Jésus ; il leur donna congé de prescher l’Évangile en ses terres et de bastir une église en sa ville royale de Chandeghery. Le 18 septembre 1599, ce prince accorda aux prêtres de la compagnie de Jésus des lettres patentes par lesquelles il permettait à tous ses vassaux qui se voudraient rendre chrestiens de ce faire, et de retenir leurs offices, honneurs, dignités et gouvernemens, avec tous leurs biens et possessions, de mesme que lorsqu’ils estaient payens.

En l’an 1601, l’empereur assigne aux pères une pension de mille pagodes, qui doit leur être payée sur les revenus du district de Cougeveram par son gouverneur en cette ville. En l’an 1602, il envoie une ambassade fort honorable au vice-roi des Indes pour la couronne de Portugal, et veut qu’elle soit accompagnée par deux pères jésuites de la mission de Chandeghery. En 1609, Ventacapaty marche contre un de ses vassaux rebelles, qui, retiré dans la forteresse de Vellore, refusait de reconnaître l’autorité du roi. Il s’empare de la place, s’y installe avec la reine, et y séjourne plusieurs années. Il s’était fait suivre dans cette expédition par un des pères de la mission de Chandeghery, qu’il retint auprès de sa personne à Vellore, et sous l’influence duquel il écrivit la même année au roi de Portugal la lettre que voici :


Lettre du raja des rajas, grand seigneur, grand chevalier, roi Venlacapaty, au très puissant seigneur de la terre et de lainer, dom Philippe, roy de Portugal.


« Je reçus la lettre de votre majesté et me réjouis fort l’entendant lire. En icelle, votre majesté me traitait de deux choses : l’une était touchant les pères de la compagnie de Jésus qui sont en ma cour,