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dans tous les coins. Il n’y a pas d’autre ameublement qu’un mauvais bois de lit et une marmite ; point de lit, un peu de paille en tient lieu, et pour couvertures ils ont des haillons. Un feu de tourbe remplit la chaumière de fumée, et attire les enfans qui viennent s’accroupir autour de l’âtre. Toutes les chaumières se ressemblent ; je n’ai vu, dans aucune partie de l’Angleterre, une aussi abjecte pauvreté. »

Les journaliers ne reçoivent pour salaire que 9 à 10 pence (92 c. à 1 fr. 03 c.) par jour en été, et 6 pence (61 c.) en hiver ; mais ils ont du moins la faculté de quitter le travail des champs pour celui des mines, qui est florissant dans le pays de Galles, et que fécondent les capitaux de l’Angleterre. Les fermiers, au contraire, espèces d’immeubles par destination, ne peuvent pas émigrer, ni chercher fortune dans une autre industrie. C’est la classe la plus à plaindre, car les charges dont le capitaliste prend ailleurs sa part pèsent ici uniquement sur le travail, et le fermier du pays de Galles, de déchéance en déchéance, en est venu à n’avoir pas d’autre capital que la vigueur de ses bras. Ainsi, les grands vivent littéralement de la ruine des petits ; chaque année de fermage coûte au fermier une faillite. Une classe moyenne ne peut pas se former dans les campagnes, car, à chaque effort que fait le pauvre pour s’élever, il retombe bientôt au-dessous du point d’où il était parti. Cet éternel servage des Gallois a ému les commissaires du gouvernement, qui, n’osant pas invoquer l’intervention de la loi, en appellent du moins à la prévoyance et à l’humanité des propriétaires fonciers.

Les seules réformes que l’on ait tentées dans le pays de Galles ont tourné au détriment des populations. La loi du 13 août 1836, qui commua les dîmes, impôt variable de sa nature, en une rente fixe, rente payable en grains, mais qui s’évalue en argent au cours moyen des mercuriales, a été bien accueillie en Angleterre, où elle faisait cesser des procès sans terme et des difficultés infinies ; mais on a eu le tort, en l’appliquant aux douze comtés gallois, de ne pas l’accommoder aux habitudes locales, et l’on a commis la faute encore plus grave de prendre pour base des évaluations des prix qui n’étaient pas ceux de la contrée. Il en résulte que la somme fixe à payer se trouve, dans la plupart des cas, beaucoup plus élevée que ne l’était auparavant la moyenne des dîmes. Les fermiers demandent donc à les payer en nature, comme par le passé, alléguant que cet impôt, au lieu de ressortir au dixième, leur enlève souvent le sixième du revenu. Ajoutez qu’une partie seulement des dîmes étant consacrée aux besoins du culte, et le reste devenant l’apanage des propriétaires fonciers, la destination de cet impôt ne peut plus le protéger contre les réclamations