Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/560

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

LES BRETONS


poème de m. brizeux.


Séparateur



Voici, grace aux muses, une œuvre conçue dans le pur sentiment de l’art, une œuvre pleine de dextérité technique et d’élégance naturelle, de délicatesse et de fermeté. Voici, chose aujourd’hui peu commune, un écrivain qui tient ses promesses, une vocation réelle et vivace qui grandit et mûrit, et dont les fruits valent les fleurs. Au milieu de la triste décadence où la dépravation du goût public entraîne notre littérature de plus en plus fourvoyée, sous le poids de cette atmosphère de bazars et de commandite qui étouffe et étiole tant et de si fraîches espérances, en face de tant de lyres faussées, désaccordées ou muettes, il y a plaisir à rencontrer un talent sain et dispos, dont rien n’entrave la croissance ou ne fait dévier la marche, un poète heureux de n’être que poète, assez fort dans sa délicate nature pour se refuser à la fois au découragement et à l’orgie, et pour repousser d’un égal dédain le lieu commun qui tue la pensée et l’exagération qui la rapetisse.

Tous les lecteurs de la Revue des Deux Mondes connaissent l’heureux début de M. Brizeux, Marie, légère création demi-celtique et demi-grecque, abeille de l’Hymette égarée parmi les genêts de la Bretagne. Un juge beaucoup plus expert et plus compétent que je ne puis l’être a analysé (on s’en souvient) les subtils et exquis par-