Page:Revue des Deux Mondes - 1845 - tome 11.djvu/630

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

suivant les hommes pratiques, au moins huit à dix jours de travaux non interrompus.

On ne crut pas devoir recourir à l’escalade ; j’avoue cependant que, dans mon opinion, cette opération n’eût pas été peut-être impraticable de nuit sur un des points de l’enceinte, entre la porte Bal-el-Gharbia et le Rummel ; on doit remarquer que cette muraille n’était pas flanquée. Une fois les têtes de colonne parvenues dans la ville, elles eussent été à couvert, et l’obscurité aurait favorisé cette tentative hardie, qui se serait opérée sans désordre, si on avait eu soin de bien reconnaître d’avance les points du rempart les plus favorables pour poser les échelles.

Quoi qu’il en soit, on décida que le seul moyen était de donner l’assaut, qu’on chercherait en conséquence à ouvrir une brèche dans la courtine située entre la porte Bab-el-Gharbia et la porte Bab-el-Oued, condamnée par l’assiégé ; que tous les efforts devaient tendre à amener de grosses pièces de siège à la batterie de Nemours, fût-ce même en passant à demi-portée sous le feu de la place, puisque l’état de la route que l’on avait essayé de faire prendre aux canons de 24 en tournant le Coudiad-Aty avait rendu l’armement de cette batterie impossible. Ce fut alors qu’on reconnut combien on avait eu raison d’insister pour amener le grand parc de siège sous les murs de Constantine. Notre seul espoir désormais était dans l’effet destructeur que pourraient produire nos boulets de gros calibre sur les vieilles murailles de construction romaine, si nous étions assez heureux pour pouvoir amener nos pièces à la batterie de brèche.

L’ennemi continua sans relâche à nous harceler dans nos positions toute la journée. Rien n’est fatigant comme cette tiraillerie continuelle ; ces Arabes sont comme des guêpes qu’on ne peut chasser, et qui bourdonnent sans cesse à vos oreilles. L’état du terrain, particulièrement sur le Mansourah, était déplorable. Nous nous levâmes le 10 assez tristement, appréhendant que la pluie n’eût rendu impraticable l’armement de la batterie de Nemours. En attendant notre départ, le prince me donna l’ordre d’aller savoir des nouvelles et de voir du haut du Mansourah si la batterie de brèche au bas du Coudiad-Aty avait pu être armée. Je rencontrai M. le lieutenant-général Valée, qui m’apprit qu’on n’avait pu encore amener les pièces qu’à trois cents toises de la batterie, par suite de toutes les difficultés du temps et de l’obscurité, auxquelles était venu se joindre le feu de l’ennemi, qui avait beaucoup tiré de ses batteries basses ; mais il me donna l’assurance que la batterie de brèche serait armée le lendemain. Le fait est