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légitimes. En effet, on a toujours admis avec raison que l’employé destitué perd tout droit à la pension : dans le système des pensions sans retenues, cette peine est juste et naturelle, car l’état ne doit pas récompenser des services qui, interrompus par la faute de l’employé, n’ont pas eu la durée requise ; dans le système des retenues, au contraire, cette peine a l’apparence d’une confiscation, car le trésor semble s’emparer des sommes que l’employé est censé avoir versées lui-même à la caisse. Il n’est pas vrai, du reste, que les retenues doivent donner plus de sécurité aux pensionnaires. S’il, arrivait que l’état fût assez malheureux et sa loyauté assez ébranlée pour qu’on songeât à ne plus payer les pensions, l’intérêt qui s’attacherait aux sacrifices faits par les employés n’opposerait qu’une impuissante barrière à cette banqueroute. Il ne faut pas dénaturer les institutions dans la prévision des jours de désastres publics, et c’est tomber dans une contradiction manifeste que de prévoir ces désastres comme supérieurs à toutes les règles, et de penser qu’on pourra en conjurer les suites par l’influence des principes de la morale et de la justice. Nous pensons donc que le système qui met les pensions au compte du trésor a pour conséquence logique et nécessaire de supprimer la retenue. C’est le régime déjà admis pour l’armée. Si, conformément à cette opinion, la retenue cessait d’être exercée, faudrait-il réduire proportionnellement les traitemens de ceux qui la subissent aujourd’hui, ou devraient-ils profiter du bénéfice qui résulterait de cette dispense ? La réponse à cette question est subordonnée à l’état des finances et aux besoins réels des fonctionnaires. Nous avons assez fait connaître notre pensée pour n’avoir pas besoin de dire que nous pencherions pour la solution qui leur serait le plus favorable.

A plusieurs reprises, la chambre des députés a insisté pour qu’une même loi réglât les pensions de tous les fonctionnaires civils, et ses dernières commissions se sont appliquées à rattacher aux lois proposées les services qui avaient été laissés en dehors. On a sacrifié à ce désir d’uniformité l’avantage d’obtenir une loi sur les pensions des administrations financières les plus importantes par le nombre, et qui depuis long-temps seraient soumises à une règle définitive, si l’on eût consenti à les séparer des autres. Qu’une seule loi embrasse donc tous les services, cela est plus conforme aux habitudes de notre législation ; mais il serait très regrettable que cette réunion fit oublier des différences essentielles. On a vu, à l’occasion des traitemens, l’inégalité de ceux qui sont accordés à certains services comparés à d’autres. Nous ne voudrions pas que cette inégalité s’étendît aux pensions. Les services dont les traitemens sont les plus faibles sont ceux dont les membres éprouvent