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éliront les candidats ? Même objection : les choix seront faits dans un esprit local et étroit. Les illustrations vivent surtout dans la capitale : les collèges de département viendront-ils les y chercher ? — Je suis peu touché de cette objection ; mais je vais signaler une autre difficulté. Dès qu’il y aura, pour nommer les candidats à la pairie, des collèges de département, les collèges d’arrondissement, chargés de nommer les députés, deviendront impossibles. On ne concevra pas ces doubles collèges et cette double élection. Il faudra tôt ou tard faire élire les députés par les collèges de département chargés de choisir les candidats à la pairie, ou faire élire les candidats à la pairie par les arrondissemens qui nomment les députés. L’électeur n’aime pas à se déranger deux fois, et il serait triste que les élections des candidats à la pairie ne fussent pas plus fréquentées que les élections des officiers de la garde nationale. Quoi qu’il en soit, l’élection au chef-lieu devient inévitable pour les députés, si elle s’y fait une fois pour les candidats à la pairie, et alors revient la juste objection qu’au lieu de deux chambres d’origine et de vocation différentes, vous avez la même chambre partagée en deux salles.

Ajoutez que si, pour éviter entre les deux chambres l’identité de nature et d’origine, vous créez des collège d’électeurs différens, si vous exigez un cens plus élevé, si vous les réunissez au chef-lieu du département, ou même, comme on le proposait aux chefs-lieux de cours royales, vous rétablissez, comme nous l’avons déjà dit, les grands collèges de la restauration et le double vote.

Le rapport de M. Bérenger discute et écarte tour à tour les divers systèmes de candidature que je viens d’indiquer. Il en est deux autres qu’il discute à peine et dont je dois parler avec quelque détail, car ils me semblent préférables aux autres systèmes, et ils ont l’avantage de donner à la pairie une origine plus nationale et plus indépendante. Je veux parler 1° du système qui donne à la chambre des pairs le droit de se recruter elle-même, comme fait l’Institut ; 2° du système qui rattache la pairie aux conseils-généraux, et leur confie le soin de présenter des candidats au choix du gouvernement.

Un homme éclairé et honnête, M. Félix Bodin, proposait en 1831 le système qui donne à la pairie le droit de pourvoir à son propre recrutement, et, de nos jours, un publiciste distingué, M. le comte Czieskowski, a renouvelé cette idée dans une brochure remarquable. Ce système cependant ne peut plus aujourd’hui être proposé d’une manière aussi complète et aussi étendue qu’en 1831. En effet, M. Félix Bodin, faisant la chambre des pairs à l’instar de l’Académie,