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presque immense, jusque dans les régions les plus reculées[1]. » L’exemple du grand Frédéric, qui dut peut-être la vie, dans l’une des périodes les plus importantes de son règne, à l’usage des eaux d’Egra, ne servit pas médiocrement non plus à leur illustration. Ce fut la première chose que lui prescrivit le célèbre Cothenius, quand il prit place auprès de lui en qualité de premier médecin. « En 1748, dit ce médecin dans un document qui nous a été conservé par le docteur Hufeland de Berlin, époque où j’eus l’honneur de remplir les fonctions de premier médecin, la santé de sa majesté était fréquemment dérangée par divers maux. Le roi croyait sa fin si prochaine, que j’eus beaucoup de peine à le faire revenir de l’idée qu’il mourrait dans le courant de l’année. Sachant combien il était ennuyé et fatigué de cures multipliées, je lui prescrivis celle des eaux d’Égra, en lui imposant un régime sévère, et je ne craignis pas de lui promettre, à cette condition, l’entier rétablissement de sa santé. L’effet répondit parfaitement à ma parole, et je reçus de nombreuses preuves de la reconnaissance de mon souverain, à qui je fis répéter tous les ans le même traitement, »

En voilà assez, monsieur, pour expliquer comment, dès la fin du XVIIIe siècle, le gouvernement autrichien jugea nécessaire de prendre des mesures pour la création d’un établissement de bains à proximité de ces sources. Cet établissement fut mis à la charge de la ville d’Égra, qui, malheureusement, n’est pas riche, et de là est venu en partie le peu de vivacité du développement de Francesbad. Outre que les fonds n’abondent pas, la commune les voit toujours avec déplaisir s’appliquer à des dépenses qui ne tournent pas immédiatement à son profit. Aussi, pendant long-temps, le seul édifice public fut-il celui de la salle de réunion : on avait dû se contenter d’exciter, par l’appât de certains privilèges, les propriétaires à construire, et les bains, faute d’un bâtiment destiné au service général, se prenaient çà et là dans les maisons particulières. Ce n’est que depuis 1830 qu’il existe à Francesbad un bâtiment de ce genre, que ne cessaient de réclamer, depuis l’origine, malades et médecins ; mais, par une maladresse qui ne se justifie que par la pénurie de la commune, cette construction, la seule qui fût propre à donner un revenu, a été concédée à un particulier, de sorte que la ville n’en reçoit rien. Du reste, Francesbad a eu l’avantage, dans ces débuts malaisés, d’être dirigé par une main ferme et habile. C’est là, en effet, dans les modestes fonctions d’inspecteur civil, que s’est fait le noviciat administratif de M. le comte Munch-Billinghausen, devenu depuis lors si célèbre comme président de la diète germanique ; c’est là aussi, peut-on dire, qu’il a commencé à se faire connaître. C’est à lui que Francesbad doit ses principales fondations : l’encaissement de la source de Louise, qui est celle des bains ; la colonnade de la source de François, qui précédemment, la source Salée n’étant pas encore en usage, fournissait la boisson par excellence ;

  1. Opusc. Phys. ; Ulme, 1746.