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mais sans arrière-pensée, et pour faire plus intime connaissance avec son peuple. Comme les mauvais conseils ne manquent jamais, il est bon pourtant de montrer à tous les vrais amis de leur pays quelles seraient les conséquences d’une telle tentative. Si elle échouait, comme c’est probable, c’en serait fait tout de suite, ainsi que la Russie le désirait si ardemment en 1843, de la royauté bavaroise. Si elle réussissait, ce serait un succès momentané qui conduirait infailliblement au même dénouement. La constitution actuelle n’est pas parfaite ; quelle constitution l’a jamais été ? Mais, telle qu’elle est, elle peut donner au pays tout ce dont il a besoin. Je sais que, lorsque les choses vont mal, il est plus commode de s’en prendre à la constitution qu’à soi-même. Un peu plus de monarchie selon les uns, un peu plus de démocratie selon les autres, voilà le remède véritable. Je ne vois dans tout cela que des excuses puériles ou de coupables prétextes. Les constitutions, sans doute, ne sont pas éternelles, et il vient un jour où elles doivent être réformées ; mais il faut d’abord qu’elles durent, et qu’une expérience suffisamment longue en ait clairement démontré les avantages et les inconvéniens. Dans tous les pays constitutionnels, hormis en Espagne, cela est élémentaire. La Grèce, encore une fois, envie-t-elle le sort de l’Espagne ?

Dans l’article qui a fait tant de fracas à Athènes, j’avais rappelé les antécédens des divers partis, et rendu justice au patriote illustre qui, depuis trente ans, se dévoue pour son pays. J’avais en même temps raconté les fautes du ministère Maurocordato et exposé, non sans quelques doutes, non sans certaines inquiétudes, les causes qui, après la chute de ce ministère, ont amené un rapprochement entre le parti national et le parti napiste. Enfin j’avais signalé à la majorité nouvelle les écueils sur lesquels, à mon sens du moins, elle pouvait se briser. Je viens aujourd’hui de dire ce que je pense des premières opérations parlementaires. La part de chacun ainsi faite, je n’en désire pas moins de toute ma force le maintien du ministère actuel, et l’union des deux hommes qui le personnifient. Quand on écrit sur la Grèce, on ne doit jamais oublier que, placé entre l’Angleterre qui veut l’affaiblir et la Russie qui veut l’absorber, ce pays n’est point encore arrivé à l’état normal et régulier. On ne doit pas oublier non plus que, pour résister aux intrigues étrangères qui l’assiègent, il a besoin du concours de tous ses véritables amis au dehors comme au dedans. Quand le parti national. fait des fautes ou commet des injustices, il est bon de le lui dire ; mais ce n’est pas une raison pour lui retirer tout appui et toute sympathie, car ce parti, après tout, est le seul qui