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Pendant que M. Thiers écrivait son Histoire de la Révolution, ou peu après l’avoir terminée, il laissait échapper quelques articles ou morceaux de critique, soit au Constitutionnel, toujours, soit au Globe, où il faisait une fois le Salon (septembre 1824)[1]. Son morceau sur Law, mis en tête d’une certaine Encyclopédie progressive qui n’alla pas plus loin (1826), mérite d’être tout particulièrement remarqué, et il fut très lu au moment de la publication. L’auteur tient encore, et avec raison, à cet ancien travail dans lequel il jeta ses propres idées sur les banques. Il le rédigea sur un recueil d’édits du temps de Law ; on crut qu’il avait puisé à des mémoires particuliers. Avec des édits, comme avec des traités, comme avec toutes sortes de pièces officielles, il y a moyen de refaire toute l’histoire, mais il faut savoir les lire. En général, savoir lire les pièces, c’est là un des secrets de l’originalité historique de M. Thiers. M. Duchâtel parla de ce travail sur Law, dans deux articles du Globe (2 et 12 août 1826), et discuta, avec quelque contradiction et en toute franchise, certaines des idées financières, relatives au papier-monnaie, que l’auteur y avait rattachées. Quant à la partie historique, qui lui paraissait irréprochable, il en disait : « M. Thiers vient de nous donner une histoire du système de Law, où, avec l’impartialité et l’étendue d’esprit qui le distinguent, il a exposé et jugé les plans du financier écossais, fait la part de l’éloge et du blâme, des grandes conceptions et des erreurs. Il a montré que, si le système est tombé, ce n’est point par le vice de son principe, mais par des fautes d’exécution… Il est impossible de porter plus de clarté dans les détails d’une opération financière que ne l’a fait M. Thiers en retraçant la marche du système : c’est la même précision et la même netteté que dans les belles pages de son Histoire de la Révolution sur les assignats et le maximum. Il a aussi peint, avec un rare talent, les passions nouvelles que le système avait soulevées… » Ainsi jugeait M. Duchâtel de ce savant et lucide exposé : il est bon, en chaque matière, de recueillir au passage les paroles des maîtres.

Parmi les morceaux épars de M. Thiers, je signalerai encore dans la Revue française (novembre 1829), un article développé sur les Mémoires du maréchal Gouvion Saint-Cyr, qui parut, au premier abord, n’avoir pu être écrit que par un homme du métier, et qui valut à

  1. Il n’en fit pas moins ce même salon dans le même temps au Constitutionnel. Félix Bodin, qui ne savait pas de qui étaient les articles du Globe, dit un jour à M. Dubois : « Mais on vous pille au Constitutionnel. » C’était M. Thiers qui se multipliait.