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enseignemens, prompts à prévoir les excès, s’élevaient toujours contre les croyances qui tendaient à soustraire les hommes aux préoccupations terrestres. Se retirer du monde pour vivre dans la pratique des vertus, s’enfermer dans un monastère pour y goûter dès ici-bas les douceurs d’une félicité éternelle, c’était, à leurs yeux, manquer aux devoirs d’un fidèle sujet, refuser à l’état le concours de ses travaux et de ses lumières.

Il arriva cependant que, sous les Tang, les trois sectes furent tour à tour favorisées ; le second souverain de cette dynastie, Taï-tsou, cultiva les lettres et publia des édits par lesquels il voulait ramener le peuple aux doctrines primitives. Il réhabilita solennellement la mémoire un peu oubliée de Confucius. Un des descendans du grand moraliste fut chargé par ce prince de réunir les savans dans sa capitale, et de rédiger avec eux une explication raisonnée des livres canoniques. Sous son règne, l’un des plus glorieux qui aient illustré la Chine, l’instruction publique, l’administration des armées et des provinces, tout l’ensemble du gouvernement subit une réorganisation complète. Le céleste empire brilla de tout son éclat ; mais, en revenant d’un pèlerinage au tombeau de Confucius, auquel il avait décerné le nom de Taï-tseu, grand-maître de la doctrine, ce sage empereur s’arrêta complaisamment au village où était né Lao-tseu, pour conférer à ce philosophe, dont il se croyait descendant, le titre posthume de souverain. Ainsi, le prince qui n’osait admettre la religion des Tao-sse avait trouvé ce moyen tout-à-fait nouveau d’honorer le philosophe. Après lui, l’impératrice Wou-tseou, femme extravagante, ambitieuse et cruelle, s’éprit d’un jeune bonze qu’elle nomma au commandement des troupes dans une expédition qui, heureusement pour les armées chinoises, n’eut pas lieu. Ce favori dépensa tous les deniers du trésor à la construction d’un temple gigantesque, et se rendit complice des folies de la princesse dont il gouvernait les volontés. Aussi, sous Hiuen-tsoung (713 à 756), les bonzeries furent elles supprimées. L’empereur défendit « d’honorer les statues de Foë, et à toutes sortes de personnes, prince, mandarin ou simple particulier, d’avoir aucune communication avec les religieux que l’âge ou les infirmités retenaient encore dans les temples[1]. » Cependant, ce monarque, qui réagissait contre la secte de Foë, à l’instigation des lettrés, fut obligé bientôt de recourir aux lumières d’un bonze (le mathématicien Y-hing ), pour réformer le calendrier de l’empire,

  1. Histoire générale de la Chine, par le père Mailla, vol. VI, p. 201.