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ou 344 mètres cubes, qui devait peser conséquemment près de 2 millions de kilogrammes, et environ 500,000 kilogrammes (le double de l’obélisque de Louqsor) après avoir été taillé et évidé.

Outre ces immenses ouvrages[1], les monumens attestent qu’Amasis en exécuta beaucoup d’autres dont l’histoire ne fait pas mention. Thèbes et d’autres lieux en ont conservé beaucoup de traces. A Tel et Mai, l’ancienne Thmuis, dans le Delta, se trouve un monolithe tout-à-fait semblable à celui dont parle Hérodote, et d’une assez grande dimension, puisqu’il a 7 mètres de haut, 3 mètres 95 de large, 3 mètres 21 dans l’autre sens, selon les mesures de Chanaleilles et de Girard ; M. Burton y a lu le nom d’Amasis. D’après cela, on voit qu’Hérodote a seulement parlé de ce qu’Amasis avait fait de plus remarquable, et que ce prince avait un goût décidé pour ces monolithes de granit qu’il tirait à grands frais de Syène et d’Éléphantine. Au témoignage de sir G. Wilkinson, les carrières de Syène portent encore plusieurs inscriptions qui annoncent que ce roi en a tiré des blocs pour les édifices qu’il voulait élever dans la vallée du Nil[2]. Ainsi les monumens mêmes viennent confirmer le témoignage d’Hérodote sur les travaux exécutés par Amasis peu d’années avant l’arrivée de Cambyse.

Le ressort énergique qui avait élevé les colossales constructions de Thèbes, dix ou douze siècles auparavant, ne s’était nullement affaibli. Le goût pour ces grands ouvrages subsistait dans toute sa force ; les Égyptiens savaient encore transporter et soulever ces masses énormes.

Le grand monolithe d’Amasis, avant d’être évidé, ne pesait pas plus qu’une des énormes pierres qu’on trouve encore dans les ruines de Balbeck. Plusieurs ont 58 pieds de long, et Volney en a mesuré une de 69 pieds 2 pouces de long, de 12 à 13 pieds dans les deux autres sens ; cette pierre, qui est une espèce de granit, doit peser au moins 900,000 kilogrammes, et elle provient, comme toutes les autres, d’une carrière située dans la montagne adjacente à la ville, d’on les Romains ont su, à l’époque des Antonins, l’amener sur le sol du temple. Ils n’ont pas été plus embarrassés pour dresser à Rome (comme les Grecs à Alexandrie) les plus grands obélisques égyptiens, ainsi que la fameuse colonne dite de Pompée, élevée en l’honneur de Dioclétien, et tant d’autres colonnes triomphales d’égale dimension qu’ils tiraient des

  1. Description de l’Égypte ; Antiquités, t. V, pl. 29, n° 16 à 19. — On a récemment découvert une carrière d’albâtre qui, d’après l’observation de M. Prisse, doit avoir été ouverte et exploitée par Amasis.
  2. Wilkinson, Manners and Customs, I, 191, 192.