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accusait plus nettement par son attitude l’influence du monarque belge, et le but vers lequel celui-ci pouvait pousser son jeune parent. En 1836, lors de la première tentative qui se soit faite pour restaurer la charte, M. Wan-de-Weyer a été, de notoriété publique, un des plus ardens instigateurs du mouvement avorté de Belem.

Après les puissances qui assistent M. da Costa-Cabral de leurs conseils, viennent celles qui sans aucun doute le patronnent et désirent qu’il se maintienne, mais se feraient un vrai scrupule de le troubler ou de l’importuner de leurs représentations, et n’entretiennent guère que pour la forme des ministres auprès de la reine doña Maria. C’est là un rôle extrêmement habile, on en peut juger, qui, sans donner le moindre titre à la reconnaissance, ni à la considération du parti que soutient M. da Costa-Cabral, indispose au-delà de toute expression le parti qui le combat. Pour ceux qui savent quelle est aujourd’hui en Europe l’attitude de notre diplomatie, est-il besoin d’ajouter que ce rôle est celui de la France ? Il y a quelques années, un jeune secrétaire d’ambassade, plein de fermeté et d’intentions excellentes, M. Forth-Rouen, ayant manifestement témoigné ses sympathies au parti septembriste, il suffit d’un mot pour refroidir son ardeur ; il est vrai que ce mot venait de Paris, et qu’il tombait de bien haut : « Mieux vaut, dit un grand personnage, mieux vaut n’être rien que d’être brouillon. » Ce mot a été plus tard complété par un autre, non moins significatif, attribué au même personnage, et dont voici le sens très précis : « Qu’avons-nous à faire du Portugal ? Cela regarde le roi des Belges. » Nous sommes loin de contester les lumières du roi des Belges ; mais, en vérité, si réellement la France a des intérêts en Portugal, elle pourrait tout aussi bien s’en occuper elle-même. La France, on ne peut le méconnaître, n’exerce pas en ce moment à Lisbonne l’influence directe et active qui devrait lui appartenir. Nous en dirons autant de l’Espagne. Auprès de doña Maria, la diplomatie espagnole prend scrupuleusement exemple sur la nôtre. Le plus clair bénéfice que l’Espagne, ainsi que la France, ait jusqu’ici retiré des étroites relations de famille qui viennent de s’établir entre Doña Isabel et doña Maria, c’est que, dans les salons des Necessidades, notre grand cordon de la Légion-d’Honneur ait pu briller sur la poitrine de don Luis Gonzalez-Bravo.

Dans la quatrième catégorie se rangent les diplomates qui avant tout se préoccupent de l’industrie et du commerce de leurs nations, parfaitement indifférens aux principes et aux divers régimes qui se peuvent succéder à Lisbonne, disposés à recevoir avec un égal empressement les concessions qu’ils ambitionnent, des hommes de la charte et des hommes de la constitution de septembre : nous avons nommé l’Angleterre et les États-Unis. Parlons d’abord de l’Angleterre ; il est curieux de décrire l’exacte situation où elle se trouve vis-à-vis du gouvernement de Lisbonne, qui aujourd’hui aspire à lui échapper.

Au siècle dernier, l’Angleterre a conclu avec le Portugal des conventions fort célèbres, — le traité de Méthuen, — qui, établissant une balance de commerce extrêmement inégale, devaient avoir et en effet eurent bientôt pour