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décennale des enfans nés en légitime mariage a été de 18,778, dont 500 dans les hôpitaux. La moyenne des naissances hors mariage a été de 9,936, dont 4,865 dans les hôpitaux. Ainsi plus d’un tiers de la population de Paris naît en dehors de la loi sur laquelle repose la société, et sur trois Parisiens qu’on rencontre[1], on a chance de voir un bâtard ! L’économie politique fait de merveilleuses théories sur les intérêts matériels et l’accroissement de la fortune publique. Le meilleur moyen d’enrichir une nation ne serait-il pas de la moraliser ? Quelle charge accablante infligée à la partie honnête de la société par ceux qui vivent dans le désordre ! Sur 10 enfans qui naissent dans les hôpitaux, il y en a 9 dont la naissance est le châtiment d’une faute Sur 37 femmes mariées, il n’y en a qu’une qui soit réduite à faire ses couches dans un lit d’hôpital, la proportion est de 1 sur 2 pour les infortunées qui deviennent mères sans avoir été mariées.

Depuis quelques années, le nombre des enfans naturels reconnus tend à s’élever. Vers les dernières années de la restauration, les chiffres étaient d’environ 2,300 au moment de la naissance, et de 180 postérieurement à la naissance. En 1836, on comptait 2,667 reconnaissances dans le premier cas, et 20 dans le second. Nous ne pouvons voir un progrès moral dans cette augmentation : elle semble dénoter que le respect religieux pour l’institution du mariage s’éteint chez ceux même qui conservent par honneur le sentiment de la paternité. Il faut voir au contraire un symptôme favorable dans l’accroissement du nombre des enfans reconnus par le fait d’un mariage postérieur à la naissance. Au lieu de 852 mariages réparateurs constatés en 1827, on en a compté dix ans plus tard 1087. Cet heureux résultat est dû principalement à une société charitable, celle de Saint-François Régis, qui a pour but de procurer par de bons avis ou par des sacrifices d’argent la sanction légale et religieuse aux unions irrégulières. Depuis 1826, époque de sa fondation, jusqu’au 1er janvier 1844, cette société a fait consacrer 11,007 ménagés illicites, et légitimer près de 9,000 enfans naturels.

Le nombre des mariages est proportionnel au chiffre absolu de la population. La moyenne des dernières années a été d’environ 8,200, c’est-à-dire qu’un mariage correspond à un groupe de 110 individus.

  1. Cette supposition n’est pas rigoureusement exacte, parce que la mortalité est plus grande d’au moins. 20 pour 100 parmi les enfans naturels que parmi les enfans légitimes, et surtout parce qu’un assez grand nombre des femmes qui ont une faute à cacher viennent des départemens voisins chercher un refuge à Paris.