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Qu’à ces chefs d’établissemens, en exercice depuis six ans et de réputation intacte, on adjoigne 6,000 contre-maîtres et ouvriers patentés, on aura en total 26,000 propriétaires ou directeurs d’ateliers. Cette aristocratie de l’industrie, à raison de 4 ou 5 personnes par ménage, ne donne approximativement que 120,000 ames. Or, comme la population industrielle, prise dans son ensemble, doit dépasser aujourd’hui 380,000 ames, la différence entre ces deux chiffres, soit 260,000, représente la foule nécessiteuse des petits fabricans et des ouvriers à livrets. Il est à regretter que les publications du gouvernement ne nous permettent pas d’établir avec exactitude la statistique de la classe ouvrière. Le relevé des livrets, dressé à la préfecture de police pour une période de six années (1836-41), embrasse 118 professions et donne les résultats suivans, en nombres arrondis :


moyenne par année
Livrets nouvellement, demandés 152,000 25,300
Visa d’arrivée à Paris 62,000 10,300
Visa de départ de Paris 83,000 13,800
Bulletins d’entrée chez les maîtres 258,000 43,000
Bulletins de sortie de chez les maîtres 215,000 35,800

Ce tableau donnerait la plus fausse idée du mouvement de la population industrielle. C’est que depuis long-temps, le décret de l’an XII, qui règle la police des ateliers, est tombé en désuétude faute de sanction pénale contre les maîtres et les ouvriers qui refusent de s’y soumettre. La plupart des ouvriers’, et ordinairement, disent les rapports officiels, les plus anciens et les meilleurs ne prennent pas de livrets : ceux qui en ont négligent le plus souvent de les faire viser par les maîtres, lorsqu’ils changent d’ateliers. Rien ne serait plus trompeur pour le statisticien qu’un règlement si mal observé Il faut donc en revenir aux calculs basés sur les tables mortuaires, pour faire le dénombrement approximatif des personnes engagées dans les plus importantes spécialités de l’industrie parisienne. En comprenant sous le même chiffre tous les membres de la famille, on s’éloigne moins de la réalité pour cette classe que pour la précédente, puisque souvent les femmes et les enfans y sont utilisés. Le groupe des ouvriers cordonniers parait le plus nombreux : on y compte environ 24,000 têtes. Viennent ensuite les tailleurs, 20,000 ; les menuisiers, 14,000 ; les orfèvres, joailliers, bijoutiers et ouvriers des industries accessoires, 12,000 ; les serruriers, 10,000 ; les maçons, 8,000 ; les ébénistes, 5,000 ; les typographes de diverses classes, 8,000 ; les chapeliers, 5,000 les coiffeurs, 5,000. En cherchant à nous rendre