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dont la moitié est fournie par les classes qui vivent d’un salaire, le Mont-de-Piété enregistre de son côté 1,400,000 articles dont la valeur totale, estimée à 24 millions par les préteurs, doit représenter intrinsèquement une somme de 50 à 60 millions.

Presque tous les métiers fournissent des noms à la liste des infortunés qui ont le triste courage de faire constater officiellement leur misère. On y remarque 164 hommes lettrés, désignés par les qualifications d’employés, d’instituteurs ou d’écrivains : on en comptait à peu près le double, il y a dix ans. Est-ce à dire que les professions érudites, offrent présentement plus de ressources que par le passé ? Nous n’osons pas le croire, et les voies littéraires, c’est, comme nous l’avons déjà dit, que l’encombrement tend à y diminuer. Les artistes ont plus de ressources que les écrivains contre la dernière misère. L’instrumentiste qui ne craint pas de déroger s’enrôle dans les orchestres des bals publics. Les peintres dont les toiles ne trouvent pas d’acheteurs, peuvent accepter certains travaux de décoration. 39 musiciens seulement ont sollicité des aumônes ; pas un indigent n’a pris la qualification de peintre. Quant aux professions manuelles, le nombre des indigens qu’elles produisent semble en général proportionné à celui des ouvriers qu’elles emploient : on pourrait conclure de cette remarque qu’il n’y a pas, comme le vulgaire parait le croire, de métiers absolument bons ou mauvais, et que cette concurrence qui enfante la misère est à peu près égale dans tous les ateliers. Parmi les chefs de ménage indigens, 2,196 appartiennent à l’industrie du bâtiment, qui comprend une vingtaine de professions, depuis le maçon jusqu’au fumiste. Les cordonniers inscrits sont 1011 ; les tailleurs, 477 ; les petits brocanteurs, 778 ; les hommes de peine, dont l’unique ressource est de vendre au jour le jour leur force musculaire, 2,934. Les professions serviles donnent les résultats suivans : portiers, 1,283 ; cochers et charretiers, 311 ; chiffonniers et balayeurs 271. On a déjà remarqué que les domestiques proprement dits, ceux qui se vouent au service intérieur des familles, trouvent moyen de déposer aux caisses d’épargne, à peu près autant à eux seuls que les classes ouvrières prises dans leur ensemble[1]. Ajoutons à notre tour que la domesticité est peut-être, de toutes les professions, celle qui fournit le moins d’indigens, relativement au grand nombre des individus qu’elle occupe. Plus de 50,000 domestiques

  1. De 1836 à 1841, les classes ouvrières ont contribué aux dépôts dans la proportion moyenne de 24 pour 100, et les domestiques dans la proportion de 21 pour 100.