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Bataille d’Isly.


Nous devons les pages suivantes à une bienveillance précieuse qui touche de très près à M. le maréchal Bugeaud. Ce qui rend ce récit vraiment remarquable à nos yeux, c’est qu’il peint, outre la bataille d’Isly, le général qui l’a gagnée. Nulle part le maréchal Bugeaud ne paraît mieux tel qu’il est ; nulle part son caractère et son génie militaires ne sont mieux exprimés. À côté du récit d’un grand évènement, nous trouvons dans les pages que nous publions le portrait d’un homme, et d’un homme qui a sa physionomie et sa destinée à part dans l’histoire de notre siècle.

Nous croyons savoir que le maréchal Bugeaud songe à écrire l’histoire de la guerre d’Afrique depuis quatre ans. Le récit suivant, emprunté en grande partie aux conversations de l’illustre maréchal, peut donner une idée de l’intérêt qu’aura un pareil ouvrage. Cet intérêt tiendra surtout à l’homme. Ce ne sera pas seulement une collection de bulletins de l’armée d’Afrique ; ce sera, si nous pouvons parler ainsi, une collection de leçons sur le genre de guerre qu’il faut faire en Afrique, leçons vérifiées par le succès. Henri IV disait que les mémoires du maréchal de Montluc étaient le bréviaire du soldat, les mémoires du maréchal Bugeaud seront le bréviaire de l’officier et du général en Afrique.

Le grand enseignement surtout qui sortira, selon nous, des mémoires du maréchal, et qui ressort déjà clairement du récit que nous donnons à nos lecteurs, c’est l’importance de la force morale dans la guerre. La force morale, aux yeux du maréchal Bugeaud, l’emporte singulièrement sur la force matérielle. Nous dirions volontiers qu’il y a parmi les hommes de guerre, comme parmi les philosophes, deux écoles opposées, l’école matérialiste et