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diversité des idiomes ayant de tout temps fait la diversité des emplois. Ils connaissent, par une longue pratique et leurs travaux personnel, tous les détails des collections confiées à leur garde, et la communication, la remise en place des ouvrages, n’offrent aucune difficulté. Les volumes dont se compose l’ancien fonds ont acquis dans l’usage, par les citations et les renvois, une sorte de personnalité qu’on ne pourrait détruire sans de graves inconvéniens, et de grandes difficultés pour les vérifications et les recherches. Afin de répondre à tous les besoins du service, il suffit, nous le pensons, de terminer les inventaires particuliers des divers fonds, et les dépouillemens, très avancés déjà, des collections distinctes, non pas en s’en tenant, comme on l’a fait trop souvent jusqu’ici, à une indication concise jusqu’à devenir inintelligible, mais en distinguant, autant que possible, les pièces inédites de celles qui ont été imprimées, en signalant les variantes les plus notables des divers exemplaires, en coordonnant par des renvois les documens de même nature qui existent dans les autres dépôts de Paris, et même de la province. On ajouterait ensuite aux inventaires des index onomastiques, géographiques, philologiques ; on dresserait pour les manuscrits à vignettes des catalogues descriptifs, et l’on réaliserait ainsi l’une des œuvres les plus utiles que puissent réclamer les véritables intérêts de la science.

Un travail de ce genre ne peut, il est vrai, s’accomplir que lentement, et tout ce qu’il faut demander aujourd’hui, c’est que l’on continue d’imprimer le catalogue commencé par Capperonnier, en publiant d’abord le catalogue des manuscrits français de l’ancien fonds, puis les catalogues partiels des fonds nouveaux qui sont terminés ; car ce n’est que par la publicité, et une.publicité sans limites, que le dépôt des manuscrits peut répondre au but de son institution. Cette publicité, on la doit à la mémoire des savans qui ont consacré leur vie et leur fortune à former tant de collections précieuses, et que l’avidité des plagiaires, qui vivent, comme les chacals, de la substance des morts, dépouille impunément de la gloire qu’ils méritent ; on la doit aux villes qui, dans ces dernières années, ont fait tant de sacrifices pour la conservation de leurs archives, et qui très souvent ignorent que les documens qu’elles regrettent existent parfaitement intacts au dépôt de la rue Richelieu.

En ce qui touche la conservation matérielle, on n’a rien négligé dans ces dernières années. Un grand nombre de feuilles volantes ont été fixées par la brochure ; tous les volumes, toutes les pièces détachées ont reçu l’estampille, et c’est une précaution sage, car il y a, dans plus d’une bibliothèque, des gens qui, à défaut d’autres titres, se sont fait un nom en lacérant des feuillets, en emportant des parchemins et des volumes ; il suffira de rappeler la perte d’un précieux manuscrit de l’ancien fonds, qui contenait quelques poésies inédites de Dante, et l’apparition de l’autographe de Molière dans une vente publique. Le manuscrit ne s’est jamais retrouvé. L’autographe, par une sorte de hasard providentiel, a été heureusement réintégré dans le dépôt ; on a déployé, pour faire rentrer ce précieux document, tout le zèle imaginable, mais peut-être n’a-t-on point cherché suffisamment à savoir comment