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ou toute conception théorique, nous voulons seulement rappeler les résultats les plus intéressans que le tableau du commerce extérieur nous offre, et en présenter le résumé ou la substance, en y mêlant les réflexions que leur examen attentif suggère.


II. – INCERTITUDE DES DONNEES SUR LE COMMERCE EXTERIEUR

Mais d’abord jusqu’à quel point peut-on s’en rapporter aux relevés présentés par la douane ? Quelle confiance méritent ces tableaux de chiffres, en apparence si rigoureux et si précis ?

C’est une justice à rendre à l’administration, qu’elle apporte dans l’exécution de sa tache un soin consciencieux. Ces tableaux du commerce extérieur, qui forment depuis long-temps un beau travail, n’ont guère cessé de s’améliorer tous les ans. Ils sont à la fois plus circonstanciés qu’ils ne l’étaient, distribués dans un meilleur ordre et plus complets. Les chiffres y sont groupés de diverses manières, avec une attention souvent fort délicate, qui épargne au lecteur la peine de rapprocher pour comparer. Quant à la sincérité des calculs, elle ne saurait être mise en doute. Avec cela, il s’en faut bien qu’on doive en accepter les résultats d’une manière absolue et sans réserve, ni qu’on puisse en tirer toutes les vérités utiles que de semblables tableaux paraissent renfermer. C’est qu’il s’y trouve, outre des lacunes inévitables, de graves inexactitudes, qui naissent ou de la difficulté des évaluations ou du système vicieux qu’on y observe.

Une partie des marchandises importées en France échappe d’abord par la contrebande à l’œil vigilant de la douane, qui ne peut en conséquence la faire entrer dans ses calculs. L’administration s’efforce quelquefois, il est vrai, d’estimer approximativement la somme des valeurs ainsi dérobées à son contrôle ; mais elle ne fait cette estimation que par conjecture, par hypothèse, et il s’en faut bien qu’on puisse accepter ses chiffres comme exacts. Quoique l’exportation donne aussi parfois quelque ouverture à la fraude, c’est surtout sur l’importation qu’elle s’exerce, et c’est là par conséquent que les lacunes des relevés doivent être fortes. Ainsi, les résultats généraux sont en ce point entachés d’erreur, et, de plus, l’équilibre entre l’importation et l’exportation, si tant est que cet équilibre doive exister, est détruit.

Pour les marchandises déclarées à la douane, les évaluations ne sont guère moins fautives. A cet égard, l’administration est obligée de s’en rapporter en général à des estimations une fois faites, estimations qui n’ont peut-être jamais été parfaitement exactes, et qui, demeurant fixes, alors que toutes les valeurs réelles sont variables, sont devenues nécessairement fausses avec le temps. C’est le tarif arrêté par une