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de nos règlemens sur le commerce ou sur la navigation qui exigeât, pour en assurer l’exécution, l’établissement d’une police nouvelle en pleine mer ; et, si l’on pouvait citer quelques exemples, je suis convaincu que l’on y pourvoirait efficacement en multipliant les moyens de police territoriale, et en aggravant les dispositions pénales qui s’y rapportent : il se passerait alors ce qui est arrivé pour la traite des nègres. Tant que la police exercée en France et dans nos colonies par nos diverses administrations, tant que la police faite par nos consuls et par nos bâtimens de guerre dans les ports étrangers sur nos nationaux ont été peu actives, et tant que nos lois pénales contre la traite ont été peu rigoureuses et n’ont pas embrassé tous les cas qu’elles pouvaient atteindre, on a introduit des nègres dans nos colonies, et la navigation française a pris part à l’importation des esclaves dans les pays étrangers ; mais depuis que des moyens de police plus complets ont été pris, et depuis que la loi de 1831 a établi des dispositions pénales suffisamment rigoureuses, d’une part l’importation des esclaves dans nos colonies a totalement cessé, d’autre part la navigation française est demeurée entièrement en dehors de toute opération de traite. Quoi qu’en dise le préambule de la convention du 29 mai, les résultats que je viens de signaler étaient obtenus deux ans avant que, par l’échange des premiers mandats, à la fin de 1833, les conventions conclues avec l’Angleterre fussent mises à exécution.

Ce que je viens de dire s’applique également aux autres nations. Toutes celles qui ont voulu sérieusement abolir la traite y sont depuis long-temps parvenues, indépendamment de toute police exercée en pleine mer, par le seul effet de leur police territoriale et de la sévérité des lois pénales qu’elles ont promulguées. Ainsi l’importation des noirs ne se fait plus dans les colonies anglaises, suédoises, danoises, hollandaises, c’est-à-dire dans aucune des colonies européennes, à l’exception des colonies espagnoles ; elle ne se fait plus dans aucun des états de l’Amérique, à l’exception du Brésil, et la navigation d’aucun pays, à l’exception de l’Espagne, du Portugal et du Brésil, ne prend part au transport des nègres d’Afrique en Amérique.

A la vérité, les croiseurs anglais ont capturé, il y a peu d’années, comme suspects de traite, deux navires sous pavillon anséatique : l’un, la Louise, a été capturé en 1841 ; l’autre, le Jules-Édouard, en 1842 ; le premier était de Hambourg, l’autre de Brème. Les tribunaux compétens ont décidé que ni l’un ni l’autre ne faisaient la traite. Nos croiseurs ont bien capturé deux navires sardes, le Pocha en 1840 et la Maria-Annetta en 1842 ; mais ces deux navires n’étaient pas des négriers : c’étaient des pirates, c’est en qualité de pirates que le conseil