Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 13.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Paris servit d’abord de décharge à Port-Royal des Champs. Tout ce que le siècle de Louis XIV eut de grand a passé là. Marguerite Périer, nièce de Blaise Pascal, y obtint une guérison qui fut regardée alors comme miraculeuse ; Mme de Sévigné contribua, avec beaucoup d’autres femmes de naissance, aux dépenses du bâtiment et de la chapelle ; la duchesse de Fontange y fut, enterrée. « Tout le monde sçait, disaient les registres de l’abbaye, le crédit que cette demoiselle eust auprès du roi. » Louise-Marie de Gonzague de Clèves, qui fut reine de Pologne, avait été élevée dans cette maison. Le cœur se trouble quand on songe au changement de destination qu’ont subi de nos jours les bâtimens à demi ruinés de cette abbaye sévère. Comment l’asile de la prière et de la chasteté est-il devenu un hôpital de femmes enceintes qui viennent pour la plupart se délivrer des suites du libertinage ? Où êtes-vous, Angélique Arnaud, vous dont le nom seul répandait un parfum de vertu dans cette solitude ? Hâtons-nous de dire que les traces de la sainte janséniste ne sont pas entièrement effacées dans la nouvelle maison d’accouchement. Des sœurs infirmières ont succédé aux anciennes religieuses de l’ordre de Cîteaux. Consolons-nous la charité vaut la prière ; aux yeux même de la foi, l’hôpital est une église où l’on assiste Dieu dans ses malades.

Le second établissement affecté aujourd’hui au service des enfans trouvés était une succursale où les pères de l’Oratoire, qui avaient leur maison rue Saint-Honoré, exerçaient pendant une année aux pratiques religieuses les novices qui se destinaient à entrer dans la congrégation. La maison jouissait de beaux revenus, et était assez grande non-seulement pour loger la communauté, mais même pour fournir des appartemens à plusieurs personnes de, distinction qui venaient, comme on disait alors, y travailler à la seule affaire nécessaire. C’est de là que sont sortis pénitens les abbés de Rancé et Le Camus. Un jardin spacieux et planté d’arbres qui donnaient du couvert dans les plus grandes chaleurs s’étendait çà et là dans la campagne, sans autre défense qu’un mur de clôture. Aujourd’hui ce jardin a été fort entamé et fort resserré par les constructions voisines qui sont venues s’établir sur ces terrains, rejetés, avant la révolution, en dehors de la barrière. Les bâtimens seuls, quoique retouchés, ont conservé ce caractère imposant et cénobitique dont l’esprit religieux savait revêtir ses moindres ouvrages. L’entrée de la chapelle, qui s’ouvrait autrefois sur la rue d’Enfer, a été brutalement masquée par un mur. La façade, quoique simple, est d’une ordonnance agréable. Un Enfant-Jésus au maillot sort d’un nuage de pierre dans lequel flottent des têtes d’anges. On lit sur la frise qui accompagne cette figure le passage suivant tiré de