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de l’autocratie pure. Les paroles venues de ce côté-là ne sont certes pas discours de révolutionnaires : on veut avant tout affermir et relever le trône grand-ducal ; on a plus d’un grief contre la charte dont on s’est embarrassé en 1818, on lui cherche un antidote. C’est ainsi qu’on est arrivé à considérer la rigueur de la foi positive comme une sûre garantie de l’obéissance des sujets. Il n’y avait point, dans la partie protestante du duché, ce salutaire développement du piétisme que certaines puissances allemandes ont accepté de si grand cœur, comme étant le meilleur gage de leur sécurité : pourquoi donc n’aurait-on pas usé chez soi de l’autorité du prestige ultramontain, comme on use ailleurs des ressources calmantes de l’esprit méthodiste ? Ce n’était pas de trop pour assoupir l’opinion publique et dompter cette infatigable turbulence d’une chambre factieuse.

Qu’est-il résulté de cette belle tactique ? On a cru se donner des alliés complaisans : une fois pris au piège, on a vu qu’on s’était donné des maîtres. La religion s’offrait en aide à la politique ; c’est elle qui bientôt a pris la politique à sa remorque. L’indépendance des églises rhénanes vis-à-vis du saint-siège avait été proclamée par leurs chefs les plus éminens à la fin du XVIIIe siècle ; on en était alors à vouloir des libertés germaniques comme la France avait ses libertés gallicanes. Du sein même de la cour épiscopale de Trèves on fulminait contre les jésuites. Depuis quatre-vingts ans, les électeurs ecclésiastiques et les évêques non médiatisés s’entendaient pour renfermer l’autorité du pape dans de plus justes bornes. Ce n’était pas l’administration séculière de 1803, ce n’était pas même le timide retour des influences romaines en 1827 qui pouvaient effacer de pareils antécédens et gâter une situation si favorable à la paix publique. Cette situation, cependant, le grand-duc l’a perdue en quelques années, pour avoir voulu trop s’appuyer sur la main trompeuse qu’on lui tendait, et les ultramontains, devenus à Fribourg les dominateurs absolus de l’église et de l’université, tourmentent de plus en plus leurs imprudens patrons. Ceux-ci commencent enfin à réfléchir ; il est déjà tard. La nouvelle secte catholique n’en a pas moins été fort rudement traitée, fort gênée dans ses pérégrinations et dans sa propagande ; mais on a pris une attitude plus ferme vis-à-vis du tapage clérical de l’orthodoxie, et l’on a montré quelque décision. En 1842, il sortit de Fribourg un violent pamphlet sur l’état du catholicisme dans le grand-duché de Bade. La réponse, qui fut vive, attribuée maintenant à M. Nebenius, prend ainsi un caractère presque officiel. Cette année même, les professeurs ultramontains ont fondé un journal populaire, qu’ils