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HISTOIRE DES ÉTATS-GÉNÉRAUX DE FRANCE, par E.-J.-B. Rathery, de la Bibliothèque du Louvre[1]. — HISTOIRE COMPLÈTE DES ÉTATS-GÉNERAUX ET AUTRES ASSEMBLÉES REPRÉSENTATIVES DE FRANCE, DEPUIS 1302 jusqu’en 1626, par M. A. Boullée, ancien magistrat[2]. — Le sujet traité dans les ouvrages de MM. Rathery et Boullée avait été mis au concours en 1840 par l’Académie des sciences morales et politiques, et il faut avouer qu’il était bien choisi, car, si l’on traçait d’une manière complète l’histoire de nos assemblées représentatives, on ferait en même temps l’histoire de toutes nos institutions politiques. Ce fut, comme on sait, en 1302, sous Philippe-le-Bel, un des princes les plus despotes qui aient régné sur la France, qu’eut lieu, à propos de la querelle de ce roi avec Boniface, la première assemblée à laquelle on puisse donner le nom d’états-généraux. Elle ne trompa point l’attente de Philippe, et, comme il l’avait demandé, elle s’engagea à défendre l’indépendance de la couronne contre les prétentions de la papauté. L’influence des états grandit chaque jour avec l’importance des questions sur lesquelles ils furent appelés à se prononcer. En 1317, lors de l’avènement de Philippe-le-Long, ils déclarèrent les femmes inhabiles à succéder au trône, et empêchèrent ainsi la guerre civile d’éclater. Pendant la captivité du roi Jean, ils essayèrent, sous la direction d’Étienne Marcel, de Jean de Craon et de Robert Lecoq, d’opérer au profit de la cause populaire une révolution prématurée, que fit échouer la jalousie des provinces contre Paris. Devenus sous Charles VI les instrumens des partis qui déchiraient la France, réduits sous Charles VII et sous Louis XI à n’émettre que des avis fort peu écoutés toutes les fois qu’il s’agissait de la diminution des impôts et de la réforme des abus, ils jetèrent un moment un grand éclat, lorsqu’ils se réunirent, sous la minorité de Charles VIII, en 1484. En lisant les procès-verbaux de cette assemblée, restée célèbre dans nos annales, on ne voit pas sans surprise quels progrès les idées politiques avaient faits depuis un siècle. Quelques orateurs développèrent sans crainte des théories si hardies, qu’elles ne devaient recevoir leur application que trois cents ans plus tard : ainsi Philippe Pot, député de la noblesse de Bourgogne, osa proclamer que la royauté était « une dignité et non un héritage. » Malheureusement l’esprit étroit de localité, les haines provinciales, donnèrent beau jeu aux intrigues de la cour, qui, après avoir extorqué un vote de subsides, se hâta de dissoudre l’assemblée. Convoqués deux fois sous Louis XII, les états, dont il ne fut pas question sous François Ier, reparurent lors des guerres civiles qui signalèrent la seconde moitié du XVIe siècle. Ils furent réunis une dernière fois avant la révolution, en 1614, pendant la minorité de Louis XIII ; mais

  1. Un vol in-8o, imprimerie et librairie générale de jurisprudence de Cosse et N. Delamotte.
  2. Deux vol. in-8o, Langlois et Leclercq, 81, rue de La Harpe.