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Noël prochain, et cela pendant cinq années, si la guerre continue avec l’Irlande, et si je vis jusque-là. Le parlement disposera de l’usage à faire de ces 1,000 livres, à moins que le paiement n’en soit suspendu par la guerre ou par un accident quelconque.

« En outre, comme il m’est dû une solde arriérée de près de 1,500 livres sterl., comme lieutenant-général, ainsi qu’une somme plus considérable à titre de gouverneur de l’île d’Ély, je remets et tiens quitte l’état de tout paiement à opérer pour cette cause, et le reconnais par ces présentes libéré de toute dette à mon égard.

« OLIVIER CROMWELL. »


Tout en soignant ainsi les intérêts de sa gloire et de son ambitions et en calmant les jalousies par cette prudente générosité, il marie fort bien ses deux autres filles (two little wenches), Marie et Françoise, et ce pauvre Richard, qui n’aimait pas la poudre à canon, et qui devait occuper un mois le trône paternel. Carlyle réimprime consciencieusement les dix lettres relatives au contrat de mariage, et qui montrent Cromwell, comme toujours, avisé, prévoyant et clairvoyant quant à ses affaires personnelles.

Le parti modéré, le parti de l’ordre presbytérien, veut reprendre le dessus, et fait un dernier effort qui contraint Cromwell à quitter Londres, et à endosser le harnais de nouveau. La bataille de Preston lui assure la victoire définitive, et l’armée biblique est maîtresse. Tout plie, tout cède ; les Écossais eux-mêmes, qui se sont révoltés contre les indépendans, écoutent avec plaisir les sermons du révérent Stapylton, qui leur prêche l’indépendance de l’examen. « Pendant que nous minions le château, dit Cromwell[1], M. Stapylton prêchait, et les auditeurs témoignaient leur satisfaction par des gémissemens, selon leur manière nationale (in their usual way of groans). »

Au milieu de tout cela, on ne savait que faire du roi, lequel ne savait que faire de lui-même, et, dans des négociations sans fin, on proposait, de part et d’autre, des clauses illusoires que personne ne voulait accepter. Un seul homme, Cromwell, le chef de l’armée et l’homme de la Bible, grandissait dans l’orage. L’Écosse était domptée. Le puritain chargé de la garde du roi est le jeune colonel Robert Hamond, que Cromwell aime beaucoup, mais qui est rempli de doutes et de scrupules religieux sur la légalité même de la conduite tenue par les communes. Cromwell prend la peine de lui écrire une lettre de vingt pages, qui atteste éloquemment la sincérité du puritain. C’est

  1. Lettre 88.