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comme étant placé sur la tour de garde pour voir ce qui peut servir le bien public de ces nations, et ce qui peut empêcher le mal ; qu’ainsi, par les avis d’un conseil aussi sage et aussi grand que celui-ci, dans lequel est la vie et l’esprit de ces nations, ce bien puisse, humainement parlant, être obtenu, et ce mal, quel qu’il soit, être évité.

« Je vous prie instamment de jeter les yeux sur vos affaires intérieures ; voyez sur quel pied elles sont ! Je suis persuadé que vous êtes tous, j’admets que vous êtes tous des hommes bons, honnêtes et dignes, et qu’il n’y a pas un homme parmi vous qui ne désire d’être reconnu pour un bon patriote ; je sais que c’est votre désir. Nous sommes sujets à nous vanter quelquefois de ce que nous sommes, et certainement il n’y a pas de honte à nous d’être Anglais ; — mais c’est pour nous un motif d’agir en Anglais et de chercher le bien réel et l’intérêt de cette nation. — Mais, je vous prie, où en sont les choses chez nous ? — Je déclare que je ne sais pas bien par où commencer ni par où finir un pareil sujet, je n’en sais rien ; mais, je dois vous le dire, que l’on commence par où l’on voudra, on aura de la peine à se tirer de l’embarras que je vous signale. Nous sommes pleins de calamités et de divisions entre nous au sujet de l’esprit qui doit animer les hommes, et cela n’a rien d’étonnant ; cependant, par une providence de Dieu, providence merveilleuse, admirable et jamais suffisamment admirée, nous sommes encore en paix ! Et les combats que nous avons soutenus ! et les avantages que nous avons remportés ! — Oui, vraiment, nous qui sommes ici, nous sommes un étonnement pour le monde ; et considérant la manière dont nous sommes disposés ou plutôt indisposés, c’est le plus grand miracle qui soit jamais arrivé aux fils des hommes que nous soyons revenus à la paix. Et quiconque essaiera de la rompre, que Dieu tout-puissant déracine cet homme du sein de cette nation ! et il le fera, quelques prétextes que l’on prenne.

« Ceux qui brisent la paix considèrent-ils où ils nous poussent ? Ils devraient y regarder. Celui qui ne considère pas la femme enceinte dans cette nation, les enfans à. la mamelle qui ne connaissent pas leur main droite de leur main gauche (et, autant que je sache, cette cité en est aussi pleine que l’on disait qu’était Ninive) ; celui qui ne considère pas ces êtres, et le fruit que porteront celles qui vivent et qu’il faut y ajouter ; celui qui ne considère pas ces choses doit avoir le cœur d’un Caïn qui fut marqué et fait ennemi de tous les hommes ses ennemis ! Oui, la colère et la justice de Dieu poursuivront un tel homme jusqu’au tombeau, sinon jusqu’à l’enfer… »

De ses anciens majors-généraux, ces maréchaux du calvinisme, Cromwell fait autant de lords, et constitue sa chambre des pairs. La première session du parlement se termine assez bien ; la seconde commence mal pour Olivier. Il n’hésite pas, fait venir les membres à Whitehall, et les casse. « S’ils eussent siégé deux ou trois jours de plus, dit Samuel Hartlib dans une lettre, une conspiration royaliste éclatait, et Londres était à feu et à sang. »