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La seconde demande était celle de la restitution des vaisseaux pris ou détruits à Toulon, ou d’une indemnité pour leur perte. Lord Hood, en recevant les vaisseaux français à Toulon, avait déclaré qu’il les gardait seulement en dépôt pour le gouvernement que reconnaissait l’Angleterre, et qui était alors celui des Bourbons. Or, disaient les commissaires, puisque sa majesté britannique reconnaît la république, elle admet que le gouvernement français est investi d’un droit de souveraineté, par conséquent elle doit compte de son dépôt à la république.

La troisième demande était relative à une hypothèque que l’on supposait avoir été réservée par l’Angleterre sur les Pays-Bas, au nom de l’empereur d’Autriche, pour de l’argent prêté.

Lord Malmesbury se borna d’abord à faire ses réserves sur ces trois réclamations. La dernière fut, du reste, promptement réglée, lord Grenville ayant déclaré que le gouvernement anglais n’avait aucune intention de demander au gouvernement français ni l’intérêt ni le capital d’un emprunt qui était hypothéqué sur tous les revenus de l’empereur d’Autriche sans désignation spéciale.

Il n’en fut pas de même sur les deux autres points. Quant au titre de roi de France, lord Malmesbury représentait qu’il n’affectait ni les intérêts ni la sécurité de la république ; que de pareils titres avaient toujours été considérés comme indélébiles, et comme de simples mémoriaux d’anciennes grandeurs ; que les rois de Sardaigne, de Naples, en avaient de même espèce. M. Canning écrivait à M. Ellis : « Quant au titre de roi de France, j’incline à croire avec vous que, si l’on raisonne là-dessus sérieusement, nous serons battus sur les argumens, et que nous ferions mieux de chercher quel serait le mode de renonciation le plus imaginatif et le plus innocent. Notre meilleure chance est que cette question frivole soit en dernier lieu absorbée dans les considérations plus importantes du projet (de traité) et de son commentaire, et que si on arrive à un traité, ou à peu près, en peu de temps, vous puissiez, dans l’ardeur de l’action, sauter par-dessus les affaires de pure forme, et alors faufiler à la fin votre vieil article apologétique (d’excuse) sans qu’on y fasse beaucoup d’attention. »

Lord Grenville, de son côté, écrivait à lord Malmesbury qu’on pourrait se servir dans le traité seulement du mot de « sa majesté britannique, » mais en conservant le titre de roi de France dans les pleins pouvoirs, dans la ratification, et dans les autres documens venant du gouvernement anglais, et qu’on pourrait ajouter à l’article séparé quelques mots déclarant que l’usage de ce titre n’impliquait en rien une objection du roi d’Angleterre à la reconnaissance d’une forme de gouvernement républicaine en France.

En fait, cette difficulté de forme embarrassait passablement le gouvernement anglais, non pas tant à cause de l’importance qu’il pouvait