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très semblable. Le mode de groupement des élémens pouvait sans doute varier, mais ces élémens eux-mêmes paraissaient devoir être identiques. Eh bien ! l’expérience, confirmant ces prévisions, semble démontrer qu’il en est ainsi. Tous nos lecteurs connaissent au moins de réputation ces masses de pierre ou de fer qui, pour employer l’expression vulgaire, tombent du ciel, et traversent notre atmosphère au milieu de détonations semblables à des coups de tonnerre, ou avec un bruissement comparable à celui d’un char roulant sur le pavé. Long-temps les savans, égarés par des opinions préconçues, et confondant la chute des aérolithes avec les phénomènes de l’électricité, refusèrent de croire aux preuves les plus concluantes, et nièrent l’existence de ces corps. En 1768, l’illustre et malheureux Lavoisier, après avoir analysé l’aérolithe de Lucé, ne voyait dans cette masse météorique autre chose qu’un grès pyriteux frappé par la foudre. Trente ans après, Vauquelin osait, pour la première fois, déclarer en pleine académie que les pierres de Bénarès n’appartenaient pas à notre globe, et étaient réellement tombées du ciel ; mais il rencontrait encore bien des incrédules, et il fallut qu’en 1803 une véritable grêle de pierres vînt, à trente lieues de Paris, tomber sur une commune de Normandie ; il fallut que M. Biot, envoyé par l’Académie des Sciences, fît sur cet événement un rapport clos plus détaillés, pour convaincre enfin le monde savant de la réalité du phénomène.

Aujourd’hui personne ne met plus en doute l’existence des aérolithes. Bien plus, toutes les observations récentes paraissent tendre à faire regarder comme une seule et même chose les pierres météoriques, les bolides et les étoiles filantes. Ainsi ces masses, que l’antiquité adora, que le siècle passé niait, que la science de nos jours regarda pendant quelque temps comme formées dans notre atmosphère même par la combinaison d’élémens réduits à l’état gazeux, ou comme des portions de roches lancées jusque sur notre globe par l’action des volcans lunaires, seraient réellement des planètes en miniature parcourant autour du soleil l’orbite que leur assignent les lois de la gravitation. Tantôt isolés, tantôt réunis en nombre immense et formant ainsi une espèce d’anneau, ces petits astres s’enflammeraient lorsque dans leur course rapide ils viendraient se heurter contre les dernières couches de l’atmosphère terrestre, et produiraient ainsi ces traînées lumineuses qui pendant les nuits sereines sillonnent tout à coup l’azur du ciel, ou ces pluies d’étoiles filantes dont le retour périodique semble aujourd’hui bien constaté. Ces mêmes astéroïdes se changeraient en aérolithes, et tomberaient sur le sol toutes les fois que, trop profondément enfoncés dans notre atmosphère et retardés dans leur trajet par la résistance de l’air, ils ne pourraient résister à l’attraction de notre globe.

Si, comme tout porte à le croire, cette théorie, qui compte parmi ses