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Page:Revue des Deux Mondes - 1846 - tome 15.djvu/751

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très distinctement en hiéroglyphes sur ce monument, qui devait précéder de plusieurs milliers d’années les monumens historiques. La question qui s’agite aujourd’hui à son sujet entre deux savans illustres, M. Biot et M. Letronne, est d’un tout autre ordre ; je la retrouverai plus naturellement à Denderah. Il me suffit à présent de poser, comme un fait conquis à la science par M. Letronne, qu’il n’y a point eu de zodiaque en Égypte avant l’époque grecque[1]. De plus, ni télescope ni astrolabe n’ont été trouvés en nature ou représentés dans les tombeaux de l’Égypte, où l’on a trouvé tant de choses, et sur les parois desquels est figuré tout ce qui a pu servir au défunt pendant sa vie. Enfin il a fallu renoncer à cette antique sphère égyptienne présentant l’état du ciel 1400 ans avant Jésus-Christ, qu’Eudoxe aurait eue sous les yeux, à laquelle ont cru Newton, Fréret et Bailly, et que le souffle de la critique a brisée pour jamais[2].

Sur le savoir astronomique des anciens Égyptiens, je pourrais citer des expressions bien dédaigneuses de M. Delambre, l’historien de la science, celles-ci par exemple « Les Égyptiens étaient astronomes tout juste ce qu’il fallait pour être charlatans. » Je pourrais citer des paroles sévères de M. Letronne, je préfère m’en rapporter au témoignage de M. Biot, et parce que M. Biot est une de nos plus hautes renommées scientifiques, et parce qu’il a pu paraître accorder plus que d’autres au savoir astronomique de l’ancienne Égypte. On va voir dans quelles limites lui-même le restreint. « En reconnaissant le défaut absolu d’instrumens et de méthodes précises, soit pour l’observation, soit pour le calcul trigonométrique, il faut accorder aux anciens peuples de la Chaldée et de l’Égypte tout ce qu’une longue et assidue contemplation des phénomènes peut donner[3]. » C’est assez, pour la thèse que je soutiens, de ces sages paroles. Il n’y a donc en Égypte, avant les Grecs, ni instrumens ni méthodes précises pour l’observation, ni calcul trigonométrique. C’est à Hipparque seulement que commence l’emploi de ce calcul, sans lequel, dit Delambre, il n’est pas de véritable astronomie. Or, Hipparque n’a pu rien emprunter, à l’ancienne Égypte, car il n’est probablement jamais venu à Alexandrie. Ptolémée, qui y a vécu, doit beaucoup à Hipparque et rien aux anciens Égyptiens. Jamais il n’allègue leurs observations. Il cite trois éclipses observées à Babylone et pas une seule observée en Égypte.

L’invention de l’astrologie, liée aux origines de l’astronomie, n’appartient pas d’une manière certaine à l’ancienne Égypte ; la Chaldée semble y avoir plus de droits. Le nom de Chaldéen fut synonyme de

  1. Mémoires de l’Institut, XVI, 113.
  2. Letronne, Journal des Savans, 1841, 72.
  3. Journal des Savans, II, 561.