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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 octobre 1846.


Nous disions, il y a deux mois, qu’en dépit des préoccupations industrielles et économiques de notre époque, les questions politiques ne tarderaient pas à reparaître, et que l’avenir de l’Europe recélait de graves complications. Les faits, on en conviendra, ont bientôt justifié nos pressentimens. Un différend sérieux entre la France et l’Angleterre est venu altérer, pour un temps, une alliance sur laquelle, de l’avis de tout le monde, repose la paix européenne. La dynastie de 1830 a montré qu’elle entendait accepter et suivre toutes les traditions de la politique de Louis XIV dans ses rapports avec la monarchie de Philippe V. L’Espagne constitutionnelle a resserré ses liens avec la France en donnant la main de la sœur de la reine Isabelle à M. le duc de Montpensier, et si elle ne peut échapper à de nouveaux orages, elle espère trouver dans cette intimité plus de forces pour y résister. Quand nous jetons les yeux sur d’autres points de l’Europe, nous voyons qu’en Italie un pape est devenu l’espoir de tous les amis sincères du bien et des sages réformes. Les populations le saluent avec enthousiasme ; les gouvernemens limitrophes des états romains l’observent avec une certaine défiance, ils comprennent qu’avec Pie IX, l’Italie entre dans une phase nouvelle, où l’opinion des hommes modérés et honnêtes pourra conquérir assez de puissance pour se faire écouter et obéir. En Suisse, le spectacle est autre : une révolution populaire a proclamé à Genève le triomphe du parti radical : il y a dans cette brusque catastrophe quelque chose de plus grave encore que la défaite du parti conservateur. Il y a là un nouvel indice des vices de la constitution helvétique, vices qui, dans le présent, menacent la Suisse d’une funeste anarchie, et peuvent, pour l’avenir, créer la nécessité d’une médiation européenne. Si l’ordre n’est pas troublé en Allemagne, le travail des esprits s’y continue avec cette persévérance incessante qui est une des qualités du génie germanique : tous les deux ou trois mois, on voit se reproduire l’annonce de cette fameuse constitution que le roi de Prusse doit octroyer à la monarchie du grand Frédéric. La gloire du législateur est sé-